En ouvrant officiellement les discussions jeudi soir au Palais des nations de Genève (Suisse), l'émissaire de l'ONU Staffan de Mistura a solennellement appelé les camps ennemis à la "responsabilité historique".
"Le peuple syrien attend désespérément la fin de ce conflit, et rêve de sortir enfin de ce cauchemar", a lancé le diplomate devant les délégations du régime de Damas et de l'opposition, les exhortant à "travailler ensemble" car "il n'y a pas de solution militaire".
La guerre en Syrie, commencée après la répression sanglante de manifestations prodémocratie en mars 2011, a fait plus de 310.000 morts et provoqué le déplacement de la moitié de la population, soit 13 millions de personnes. Le conflit s'est complexifié avec la montée en puissance de groupes jihadistes et l'implication des grandes puissances dont les Etats-Unis et la Russie, alliée du régime du président syrien Bachar al-Assad.
"Je sais que ce n'est pas facile, il y a beaucoup de tensions (...) mais nous ne savons pas ce qui ce produira si nous échouons encore", a ajouté Staffan de Mistura, reconnaissant ne pas attendre de "miracle" de cette nouvelle série de discussions, la quatrième depuis le début de l'année dernière.
Les précédents rounds avaient capoté au bout de quelques jours en raison des violences sur le terrain et du fossé immense séparant les belligérants sur le concept de "transition politique".
Négociations directes ?
De nouveau, les pourparlers s'annoncent ardus. La tension était palpable jeudi dans la grande salle de l'Assemblée de l'ONU, où se faisaient face les délégations du régime syrien et de l'opposition écoutant le discours de M. de Mistura.
Après son allocution, l'émissaire de l'ONU est allé serrer les mains des représentants de l'opposition, avant de se diriger vers les envoyés du régime... qui quittaient la salle, sans se retourner.
M. De Mistura doit tenir vendredi des rencontres bilatérales avec les belligérants pour déterminer si les pourparlers, lorsqu'ils s'engageront réellement, se feront face à face.
Lors des précédents rounds de négociations l'année dernière, les discussions se tenaient dans des salles séparées, avec l'émissaire de l'ONU dans le rôle d'intermédiaire entre les délégations.
Le Haut comité des négociations (HCN), principale délégation de l'opposition, s'est dit en faveur de discussions directes, mais le régime ne s'est pas prononcé.
"Il s'agira d'une décision importante, car c'est toujours plus efficace quand on se parle directement. Ne pas engager de discussions directes risque de retarder les choses", estime une source occidentale.
Une autre question porte sur la composition de la délégation de l'opposition.
Des représentants du Groupe de Moscou et du Groupe du Caire, considérés comme plus modérés vis-à-vis du régime de Damas et soutenus par son allié russe, sont présents à Genève. Mais la délégation du HCN conduite par le cardiologue Nasr al-Hariri refuse qu'ils aient le statut de négociateurs.
L'ordre du jour des discussions reste également une question très délicate pour le médiateur de l'ONU.
Tout le monde semble d'accord pour discuter d'une "transition politique", prévue dans la résolution 2254 du Conseil de Sécurité qui sert de base aux négociations de paix.
Mais cette expression ne revêt pas la même signification pour le HCN, qui réclame le départ à court terme du président Bachar al-Assad, et pour le régime, qui refuse de discuter du sort du chef de l'Etat.
"La transition politique doit être au coeur des discussions", a insisté le chef des négociateurs de l'opposition Nasr al-Hariri.
"Mais il y a de nombreux obstacles, une partie en Syrie veut toujours une solution militaire", a-t-il accusé, alors que le régime, appuyé par ses indéfectibles soutiens russe et iranien, est en position de force après avoir reconquis fin 2016 la ville stratégique d'Alep, ancien fief de l'insurrection dans le nord du pays.
Les représentants des puissances régionales et internationales soutenant le régime ou l'opposition sont eux aussi présents à Genève, et chapeautent leurs protégés.
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