"Les discours clivants de Donald Trump, Viktor Orban (Hongrie), Recep Tayyip Erdogan (Turquie), Rodrigo Duterte (Philippines)... s'acharnent sur des groupes entiers de population, les désignent comme boucs émissaires et propagent l'idée selon laquelle certaines personnes sont moins +humaines+ que d'autres", les premiers visés étant les réfugiés, dénonce Amnesty international.
Et de citer le décret anti-immigration fermant temporairement les frontières des Etats-Unis aux réfugiés et aux ressortissants de sept pays à majorité musulmane, suspendu depuis, ou encore l'accord "illégal et irresponsable" conclu entre l'Union européenne et la Turquie, permettant de renvoyer des demandeurs d'asile dans ce pays.
Au total, l'ONG a dénombré 36 pays ayant "violé le droit international en renvoyant illégalement des réfugiés dans des pays où leurs droits étaient menacés".
Ces discours de rejet et de haine ont des effets directs sur les droits et libertés, pointe Amnesty: "Des gouvernements ont fait voter des lois qui restreignent le droit d'asile, la liberté d'expression, qui légitiment la surveillance de masse ou donnent aux forces de l'ordre des pouvoirs illimités".
Loin d'être l'apanage de leaders extrémistes, ces paroles stigmatisantes ont été adoptées "parfois de façon voilée, parfois de façon plus ouverte" par "des partis dits centristes", souligne John Dalhuisen, directeur d'Amnesty international pour l'Europe.
'Racaille', 'poison'
"Les discours déshumanisants, c'est quand le Premier ministre hongrois qualifie les migrants de +poison+, c'est quand Geert Wilders (député néerlandais d'extrême droite, ndlr) parle de la +racaille marocaine+, c'est aussi quand le Premier ministre néerlandais écrit une lettre ouverte invitant les migrants à se comporter de façon +normale+ ou de rentrer chez eux", cite M. Dalhuisen en guise d'exemple.
Les étrangers et les musulmans, "cibles principales de la démagogie européenne" sont "présentés comme une menace à la sécurité, à l'identité nationale, des voleurs d'emplois et des abuseurs du système de sécurité sociale", insiste-t-il.
En France, où l'ONG basée à Londres a exceptionnellement présenté son rapport annuel, Amnesty dénonce la restriction des droits fondamentaux dans le cadre des mesures prises pour lutter contre le terrorisme, en particulier l'état d'urgence, décidé après les attentats jihadistes du 13 novembre 2015 et prolongé depuis.
Selon son recensement, de fin 2015 à fin 2016, "seules 0,3% des mesures liées à l'état d'urgence ont débouché sur une enquête judiciaire pour faits de terrorisme".
En revanche, "ces assignations à résidence ont entraîné des pertes d'emploi ou la marginalisation de ces personnes", déplore Camille Blanc, présidente d'Amnesty international France.
L'ONG considère par ailleurs qu'en matière d'accueil des réfugiés, "la France n'a pas pris ses responsabilités au niveau international" et ne protège pas suffisamment les réfugiés et migrants présents sur son sol.
"Dans le cadre des élections présidentielle et législatives qui vont avoir lieu en 2017, la France est à la croisée des chemins concernant les droits humains, qui font écho à une tendance mondiale, et les citoyens ne doivent pas tomber dans le piège de ces discours qui entraînent la haine, la peur, ou le repli de soi", selon Camille Blanc.
Face aux renoncements des grandes puissances à se battre pour le respect des droits et libertés, et la passivité des Etats face aux atrocités et crises vécues en Syrie, au Yemen, ou encore au Soudan du Sud, Amnesty international appelle chacun à se mobiliser et agir.
"2017 sera une année de résistance", a dit à l'AFP le président d'Amnesty Salil Shetty. "Nos espoirs reposent sur le peuple".
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