Comme c'est le cas depuis des années, le chef de l'Etat a soufflé ses bougies lors d'une cérémonie très "select", réservée à ses seuls ministres et proches collaborateurs, pendant que les médias d'Etat l'inondaient de messages de félicitations.
Il a réservé sa seule apparition publique à la radiotélévision d'Etat, sous la forme d'un long entretien où il est apparu très fatigué et bredouillant, mais déterminé à garder les rênes du pays.
"La majorité des gens pensent qu'il n'y a personne pour me remplacer", a-t-il assuré, affalé dans un fauteuil.
"Si je pense que je ne peux plus le faire, je le dirai pour que mon parti me remplace. Mais pour le moment, je ne pense pas pouvoir dire ça", a poursuivi le doyen Mugabe.
Toute la journée les médias officiels ont rivalisé de compliments et de louanges à l'endroit du maître absolu du pays.
Le quotidien The Herald a publié 24 pages pleines de messages de félicitations de ministres et de proches du régime, la radio et la télévision inondé leurs ondes de chansons à sa gloire.
"Nous célébrons aujourd'hui son 93e anniversaire, avec l'assurance que notre pays est entre de très bonnes mains", a assuré The Herald dans son éditorial.
"Sage et visionnaire"
Le ministère de la Défense a publié un message célébrant son "leadership sage et visionnaire".
Après ce hors d'oeuvre très privé, le clou des réjouissances pour l'anniversaire est prévu samedi, sous la forme d'un banquet offert à des milliers de partisans dans le parc national de Matopos, en périphérie de la deuxième ville du pays Bulawayo (sud).
Ces ripailles toujours gargantuesques, dans un pays englué dans une grave crise économique dont 90% de la population sont privés d'emploi formel, alimentent chaque année la polémique.
Pour son 92e anniversaire, Robert Mugabe avait servi à ses invités de la viande d'éléphant, de buffle et d'antilope à profusion, ainsi qu'un énorme gâteau de 92 kilos. Coût total des festivités, selon la presse, 800.000 dollars...
Né le 21 février 1924 dans ce qui était encore la Rhodésie du Sud, une colonie britannique, M. Mugabe était instituteur quand il a rejoint les rangs de la rébellion contre la minorité blanche au pouvoir. Il s'est installé aux commandes à l'indépendance en 1980, pour ne plus jamais les quitter.
Pendant ses trente-six ans de règne, le Zimbabwe s'est terriblement appauvri et traverse aujourd'hui une profonde crise économique qui suscite la grogne croissante de la population, aussitôt réprimée par une police omniprésente.
"Réélu même mort"
En décembre dernier, son parti l'a toutefois désigné pour briguer un nouveau mandat lors du scrutin présidentiel de 2018.
"La majorité des gens pense qu'il n'y a pas de remplaçant, pas de successeur acceptable à leurs yeux", a plaidé Robert Mugabe lors de son entretien télévisé.
"Les problèmes d'aujourd'hui nécessitent des gens d'aujourd'hui", lui a rétorqué dans un billet au vitriol le porte-parole du Mouvement pour un changement démocratique (MDC, opposition), Luke Tamborinyoka.
L'homme fort du Zimbabwe s'est jusque-là toujours gardé de désigner publiquement un dauphin.
Il a toutefois laissé entrevoir sa préférence pour son épouse Grace, 51 ans, une des favorites de la course à la succession. "Elle est très acceptable. Et très acceptée par le peuple", a-t-il lâché.
Depuis quelques années, son état de santé est un sujet intarissable de rumeurs, que ses visites régulières à Singapour ou Dubaï pour se faire soigner entretiennent régulièrement.
En 2015, plusieurs chutes en public ont fait planer le doute sur ses capacités. La même année, il a lu devant le Parlement un discours parfaitement identique à celui qu'il avait prononcé un mois plus tôt, manifestement sans s'en apercevoir.
Mais à en croire son épouse Grace, ni son âge ni même sa mort de sauraient changer l'issue des élections de 2018. "Son cadavre sera candidat sur les bulletins de vote", a-t-elle lancé vendredi, "et vous verrez les gens voter pour le cadavre de Mugabe !"
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