En ce moment

Prescription des délits économiques: une réforme controversée

La réforme est passée presque inaperçue: les règles de la prescription ont été modifiées pour les délits économiques et financiers, au grand dam des magistrats et d'associations qui craignent un coup de frein à la lutte contre la délinquance en col blanc.

Prescription des délits économiques: une réforme controversée
Si cette loi avait été en vigueur au moment de l'affaire Pénélope Fillon, le candidat de la droite aurait échappé à la justice - BERTRAND GUAY [AFP/Archives]

L'article controversé fait partie d'un texte plus vaste, adopté jeudi par le Parlement, qui double les délais de prescription pour les crimes et délits. Il prévoit que les délits économiques (abus de biens sociaux, abus de confiance, prise illégale d'intérêts...) ne pourront plus être poursuivis au-delà de douze ans après la commission des faits, une limite dans le temps qui n'existait pas jusque-là pour ces dossiers.

A titre d'exemple, si cette loi avait été en vigueur quand a éclaté l'affaire des emplois présumés fictifs de l'épouse de François Fillon, une partie de ce dossier qui éclabousse le candidat de la droite à la présidentielle aurait échappé à la justice parce que prescrite (de 1998 à 2005).

"C'est honteux. On protège ceux qui ont les moyens de dissimuler leurs infractions le plus longtemps possible. Désormais, c'est le délinquant le plus habile qui s'en sortira", dénonce Céline Parisot, secrétaire générale de l'Union syndicale des magistrats (USM), principale organisation de la profession.

A contrario, les avocats de grands patrons et de grandes entreprises interrogés par l'AFP saluent une clarification juridique nécessaire.

"Je trouve que 12 ans est un délai raisonnable. La situation d'avant n'était pas saine et beaucoup de professionnels réclamaient un délai final", dit Jean Veil, avocat de plusieurs grandes entreprises, évoquant "un droit à l'oubli". Pour lui, "si le dirigeant a pris l'habitude de commettre des infractions, elles seront poursuivies, et s'il n'a commis aucun acte répréhensible depuis 12 ans", il faut considérer qu'il s'est "amendé".

Jurisprudence dérogatoire

"Il y aura peu d'affaires qui échapperont totalement aux poursuites, seules certaines parties risquent d'être prescrites", abonde son confrère Jean-Alain Michel.

En général, le délai de prescription d'un délit débute au moment où il est commis. Mais en matière économique et financière, les délits étant souvent dissimulés, la Cour de cassation a imposé en 1967 une jurisprudence dérogatoire: le délai de prescription (trois ans, porté à six ans par la nouvelle loi) démarre à partir de la révélation des faits délictueux, ou plus précisément "à partir de la date où l'action publique a ou aurait pu être engagée".

Les détournements d'argent par un patron qui contrôle les comptes de son entreprise pourront par exemple n'être découverts qu'à l'occasion du rachat de la société, souvent de nombreuses années après la commission du délit, et c'est pour cette raison que ces règles spéciales ont été instaurées.

Jusqu'ici, au nom de ce principe, les poursuites pouvaient être engagées sans limite de temps par rapport à la commission des faits, seule comptait la date de leur révélation. Mais au nom de la nécessité de corriger une "insécurité juridique", les parlementaires ont introduit dans la réforme adoptée jeudi un second mécanisme de prescription qui interdit désormais toute poursuite au-delà de 12 ans après leur commission.

Dans le passé, le législateur avait déjà tenté de modifier les règles - projets Mazeaud en 1995 ou Alliot-Marie en 2010 qui proposaient une prescription de six ans après la commission des faits -, mais les textes avaient dû être abandonnés face au tollé.

"Le législateur a repris de la main gauche ce qu'il a donné de la droite", analyse Clarisse Taron, présidente du Syndicat de la magistrature (SM), classé à gauche, qui dénonce "un régime plus favorable" aux délinquants en col blanc.

Pour le président de l'association anticorruption Anticor, Jean-Christophe Picard, "le diable se cache dans les détails et ce texte va compliquer la lutte contre la corruption". Pour contrebalancer, il faut maintenant "plus de transparence et une augmentation des contrôles", plaide-t-il.

Newsletter

Restez informé ! Recevez des alertes pour être au courant de toutes les dernières actualités.
Réagir à cet article

L'espace des commentaires est ouvert aux inscrits.
Connectez-vous ou créez un compte pour pouvoir commenter cet article.

En direct
Petites Annonces
Immobilier
Maison à vendre Carantilly
Maison à vendre Carantilly Carantilly (50570) 120 600€ Découvrir
Maison à rénover
Maison à rénover Saint-Pair-sur-Mer (50380) 402 800€ Découvrir
Maison à vendre Notre-Dame-de-Cenilly
Maison à vendre Notre-Dame-de-Cenilly Notre-Dame-de-Cenilly (50210) 179 880€ Découvrir
Maison à vendre Saint-Martin-de-Cenilly
Maison à vendre Saint-Martin-de-Cenilly Saint-Martin-de-Cenilly (50210) 196 520€ Découvrir
Automobile
VAN AMENAGE toit relevable
VAN AMENAGE toit relevable La Remuée (76430) 42 000€ Découvrir
Grand C4 Spacetourer Blue HDi
Grand C4 Spacetourer Blue HDi Caumont-sur-Aure (14240) 16 500€ Découvrir
VOLKSWAGEN TRANSPORTER VAN AMENAGE VOLKSWAGEN T6 L1H1  Van
VOLKSWAGEN TRANSPORTER VAN AMENAGE VOLKSWAGEN T6 L1H1 Van Mont-de-Marsan (40000) 17 890€ Découvrir
CARAVANE CARAVELAIR BRASILIA 450
CARAVANE CARAVELAIR BRASILIA 450 Villeneuve-d'Ascq (59491) 2 800€ Découvrir
Bonnes affaires
Leica Q2 19051 à l'état neuf
Leica Q2 19051 à l'état neuf Lyon (69001) 2 900€ Découvrir
Razer Blade 17 Ordinateur Portable de jeu (PC GAMER+Casque+Souris) Neuf
Razer Blade 17 Ordinateur Portable de jeu (PC GAMER+Casque+Souris) Neuf Lyon (69001) 1 900€ Découvrir
Sonos Arc Set+3x ones+sub gen 3 (Neuf)
Sonos Arc Set+3x ones+sub gen 3 (Neuf) Lyon (69001) 1 900€ Découvrir
grand meuble etagères
grand meuble etagères Bacilly (50530) 70€ Découvrir
L'application mobile de Tendance Ouest
Inscrivez vous à la newsletter
Les pronostics avec Tendance Ouest
L'emploi avec Tendance Ouest
L'agenda des sorties de Tendance Ouest
Les concerts avec Tendance Ouest
Prescription des délits économiques: une réforme controversée