Séoul a attribué à Pyongyang le meurtre lundi à Kuala Lumpur du demi-frère de Kim Jong-Un, qui vivait depuis des années dans un exil de fait. Si la main de la Corée du Nord est effectivement derrière l'assassinat de Kim Jong-Nam, certains ont des raisons de s'inquiéter.
A commencer par le fils de Jong-Nam, Han-Sol qui, du fait de sa lignée, pourrait être considéré comme un rival par un leader nord-coréen à la purge facile.
"Avec la poursuite du règne de la terreur de Kim Jong-Un, certaines élites à Pyongyang ont commencé à réfléchir à une possible alternance", assure l'ancien diplomate nord-coréen Koh Young-Hwan, aujourd'hui un spécialiste reconnu des affaires nord-coréennes basé à Séoul.
"Ce qui fait que Kim Jong-Un aussi s'en inquiète. Maintenant que Jong-Nam est mort, on peut imaginer que son fils court un grand danger."
On ignore où se trouve aujourd'hui Han-Sol, 21 ans, qui a étudié en Bosnie, puis au campus du Havre de Sciences-Po Paris. Sa famille a longtemps vécu dans le territoire chinois de Macao.
Certains experts de la Corée du Nord pensent que la Chine a protégé la famille de Jong-Nam avec l'idée de se garder sous le coude un potentiel successeur à Jong-Un. Au cas où...
"La Chine protégeait Jong-Nam, et sa famille, ce qui fait qu'il était encore plus détesté par le leader nord-coréen", estime Kim Sung-Min, un transfuge nord-coréen à la tête d'une radio de propagande anti-Pyongyang.
Son oncle 'dictateur'
Fils aîné de l'ex-dirigeant Kim Jong-Il, Jong-Nam fut un temps pressenti pour lui succéder. Mais il a connu la disgrâce, peut-être à cause de sa rocambolesque arrestation à l'aéroport de Tokyo avec un faux passeport en 2001. Il aurait alors expliqué qu'il souhaitait visiter Disneyland.
Il y a quelques années, il avait formulé des critiques à l'égard du régime nord-coréen auprès de journalistes étrangers.
En octobre 2012, dans un entretien en anglais accordé à Mostar (Bosnie) à la télévision finlandaise Yle, Kim Han-Sol avait, lui, qualifié son oncle Kim Jong-Un de "dictateur".
Affirmant que son "père n'était pas vraiment intéressé par la politique", il avait aussi dit vouloir aider ses compatriotes: "J'ai toujours rêvé qu'un jour, je reviendrai pour rendre la vie plus facile pour les gens."
Après la mort de son père, Han-Sol peut craindre pour sa vie, estime l'ancien militaire nord-coréen Ahn Chan-Il, qui dirige aujourd'hui l'Institut mondial pour les études nord-coréennes à Séoul.
"Il a gardé le silence depuis la critique qu'il avait faite", dit-il. "Mais maintenant que son père a été empoisonné, il va à nouveau parler pour critiquer le régime."
Jong-Nam n'est en tout cas pas le premier membre assassiné de la famille Kim.
'Parler de lui est tabou'
Le plus célèbre est l'oncle et ancien mentor de Jong-Un, Jang Song-Taek, qui a été exécuté en décembre 2013, accusé de trahison et de corruption. Il fut aussi le protecteur de Jong-Nam, celui qui veillait à ce que ce dernier ait dans son exil les moyens de son train de vie.
En 1997, Yi Han-Yong, un cousin de Jong-Nam, avait été abattu par deux tueurs près de son domicile à Séoul. Il avait fait défection en 1982 et publié un livre révélant les détails de la vie privée des Kim.
D'autres membres du clan ont par ailleurs été envoyés très loin alors qu'ils ne semblaient pas représenter une menace.
Ainsi l'oncle de Jong-Un, Kim Pyong-Il, 62 ans, a passé l'essentiel des 30 dernières années à l'étranger. Il fut un temps pressenti comme un héritier et est aujourd'hui ambassadeur en République tchèque.
"Parler de lui est tabou et les responsables nord-coréens qui sympathisent avec Pyong-Il risquent gros", explique Kim Sung-Min.
Autre frère plus âgé que Jong-Un, Jong-Chul, 35 ans, vit aussi à l'étranger dans un semblant d'exil. Il avait été repéré en 2015 à un concert d'Eric Clapton à Londres.
Le chef des renseignements sud-coréens avait affirmé l'an dernier que Jong-Chul vivait "en exil sous étroite surveillance", qu'il abusait de l'alcool et souffrait de problèmes psychologiques.
"Bien que Jong-Chul soit plus âgé que Jong-Un, il est très improbable qu'il joue un jour un rôle politique au Nord", a déclaré Thae Yong-Ho, l'ancien numéro deux de l'ambassade de Corée du Nord à Londres, passé au Sud l'an dernier.
"S'il était né dans une famille ordinaire, il aurait pu devenir un bon guitariste."
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