Mme Merkel, qui s'est rendue en Turquie pour la première fois depuis le putsch manqué en juillet, a également indiqué avoir "très longuement parlé de la liberté des journalistes" avec M. Erdogan et déploré les difficultés rencontrées par des correspondants allemands à obtenir leur carte de presse turque.
Les relations entre Ankara et Berlin, deux piliers de l'Otan, se sont sensiblement dégradées depuis la tentative de coup d'Etat visant à renverser M. Erdogan, qui a été suivie de purges dont l'ampleur suscite l'inquiétude en Europe.
Mme Merkel a été vivement critiquée en Allemagne et par l'opposition en Turquie pour ce déplacement qui survient à quelques semaines d'un référendum, prévu en avril, sur la révision constitutionnelle qui renforcerait considérablement les pouvoirs de M. Erdogan, accusé par ses détracteurs de dérive autoritaire.
"J'ai souligné que la séparation des pouvoirs et la liberté d'expression doivent être garanties" dans la révision constitutionnelle voulue par M. Erdogan, a déclaré Mme Merkel lors d'un point presse conjoint au palais présidentiel turc.
La chancelière allemande a également estimé que la consultation populaire en Turquie devrait être supervisée par une délégation de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE).
De son côté, M. Erdogan a balayé les critiques formulées par des opposants turcs qui redoutent un effacement de la séparation des pouvoirs si la réforme constitutionnelle était approuvée.
"Cela n'a absolument aucun fondement (...) Il y a un organe législatif, l'exécutif est également là, de même que la justice", a déclaré M. Erdogan. "Il n'est pas question de mettre fin à la séparation des pouvoirs", a-t-il insisté.
"Intérêt mutuel"
Les deux dirigeants ont également parlé du pacte sur les migrants conclu en mars dernier entre la Turquie et l'UE, de la situation en Syrie et en Irak, ainsi que des relations commerciales, a indiqué M. Erdogan.
C'est la troisième fois que Mme Merkel se rend en Turquie depuis que l'UE et Ankara ont conclu, le 18 mars 2016, l'accord sur les migrants qui a permis de réduire drastiquement le nombre de passages vers l'Europe depuis les côtes turques.
Le président Erdogan a toutefois menacé à plusieurs reprises de mettre fin à cet accord si les citoyens turcs ne sont pas exemptés de visa Schengen et si le processus d'adhésion de la Turquie à l'UE, actuellement au point mort, n'avance pas.
"La question des réfugiés est très importante pour la Turquie, ainsi que pour l'UE et l'Allemagne", a souligné Mme Merkel, ajoutant que le pacte sur les migrants reposait sur un "intérêt mutuel".
Ankara et Berlin ont vu leurs relations se dégrader depuis le putsch manqué: la Turquie accuse l'Allemagne d'héberger des "terroristes", affirmant que Berlin refuse d'extrader des putschistes présumés et des membres d'organisations interdites par Ankara comme le Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK) ou des groupes d'extrême gauche.
M. Erdogan a dit jeudi espérer que la justice allemande prendrait des "décisions plus rapides" à ce sujet.
Les dirigeants allemands ont à plusieurs reprises appelé les autorités turques à respecter l'état de droit. Plus de 43.000 personnes ont été incarcérées et plus de 100.000 suspendues ou limogées depuis le 15 juillet.
Des médias allemands ont rapporté la semaine dernière que 40 militaires turcs de l'Otan avaient demandé l'asile auprès des autorités allemandes. Ankara a exhorté Berlin à "réfléchir attentivement" et rejeter leur requête.
Selon des informations de presse, les deux pays sont également en désaccord sur le partage des images de surveillance récoltées en Syrie par des avions allemands décollant de la base turque d'Incirlik. Berlin refuse d'accorder à Ankara un accès total à ces données.
Ce déplacement intervient également à quelques mois de scrutins importants en Turquie et en Allemagne, où Mme Merkel regarde déjà vers les élections législatives de septembre, lors desquelles pèseront la question des migrants et les relations avec Ankara, l'Allemagne comptant trois millions de citoyens d'origine turque.
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