A quelque 10.000 km de Paris et loin des vicissitudes de la primaire du parti socialiste, le président français s'est rendu dans les montagnes du Cauca, l'une des régions les plus affectées par le conflit armé, pour visiter un campement où les guérilleros préparent leur retour à la vie civile, après plus de 50 ans de lutte armée.
Accompagné de son homologue colombien Juan Manuel Santos, il a visité l'une des 26 zones où les quelque 5.700 combattants des Forces armées révolutionnaires de Colombie (Farc, marxistes) vont déposer les armes, sous supervision de l'ONU.
A une demi-heure d'hélicoptère de Cali (sud-ouest), le camp de Caldono ressemble à un îlot, perdu dans l'immensité verte de la jungle montagneuse du Cauca et cerné d'une imposante présence militaire et policière.
Sur quelques hectares, parmi les tentes qui servent pour dormir, manger ou aux réunions de suivi du processus, s'affairent les représentants du gouvernement colombien, des Farc et du personnel de l'Onu chargé de la coordination des opérations.
Là, M. Hollande a apporté "le soutien de la France" au processus de paix colombien, qu'il a de nouveau qualifié d'"exemple pour le monde".
"Qui aurait pu imaginer que le président colombien, le président français, viennent ici dans un camp de démobilisation, de désarmement, avec des représentants des Farc, il y a simplement quelques mois ? (...) Vous l'avez fait, président Santos!", a-t-il lancé.
Des observateurs sur le terrain
A Caldono, des volontaires de l'ONG Handicap International gèrent en outre la problématique du déminage, lourde tâche pour la Colombie, pays le plus affecté du monde après l'Afghanistan par les mines anti-personnel, qui ont fait environ 11.500 victimes, dont plus de 2.000 morts.
La démobilisation des Farc, prévue par l'accord de paix signé le 24 novembre, est supervisée par un dispositif "tripartite", incluant gouvernement, Farc et Onu.
"Un mécanisme intéressant: au lieu d'un rôle incombant exclusivement aux Nations unies, les deux parties peuvent patrouiller sur le terrain, voir s'il y a des problèmes", a expliqué le chef de la mission de l'Onu, le Français Jean Arnault.
Il a précisé que, depuis Caldono, les observateurs se rendent chaque jour dans les zones de rassemblement proches pour s'assurer que les guérilleros intègrent les campements où ils vont commencer à déposer les armes, à partir de début février et dans un délai de six mois.
Avec M. Santos, François Hollande inspecte les installations, prodigue des encouragements, réitère le soutien de la France lors d'une table ronde, échange une poignée de mains avec le représentant des Farc, Pablo Catatumbo.
"Il ne s'est pas contenté de s'informer depuis son bureau à Paris, non, il a décidé de venir et pour nous c'est très positif (...) C'est le compromis de la 5ème puissance du monde et sa contribution à la paix", a déclaré le chef guérillero aux journalistes.
Reconnaître les droits des victimes
"Je veux vous appuyer autant qu'il est possible", explique M. Hollande qui dit se sentir "partie prenante". "La France ne peut pas simplement s'engager avec un vote de résolution (à l'ONU, ndlr), elle doit s'engager bien d'avantage. Elle doit être à vos côtés (...) pour le développement rural, pour la formation, les infrastructures. C'est ce dont nous avons convenu avec le président Santos."
La France, qui contribue à hauteur de 17 millions d'euros au fonds d'aide européen de 95 millions, "a appuyé comme peu de pays les efforts colombiens pour réussir la paix", a souligné M. Santos, qui avait reçu la veille son homologue au palais présidentiel Casa de Nariño.
Avant de se rendre dans le Cauca, M. Hollande s'était entretenu mardi matin à Bogota avec des proches de disparus du conflit, auxquelles il a assuré que "la volonté de la France est de faire en sorte que les victimes puissent voir leurs droits reconnus (...) connaître la situation des disparus".
Depuis les années 1960, le conflit armé colombien a impliqué une trentaine de guérillas de gauche - dont l'Armée de libération nationale (ELN, guévariste), dernière rébellion encore active -, des paramilitaires d'extrême droite et les forces de l'ordre, faisant au moins 260.000 morts, plus de 60.000 disparus et 6,9 millions de déplacés.
Parmi les victimes, Lourdes Castro, représentant un groupe de 69 associations, a déclaré au président français que "l'important maintenant est de passer de ce qui est consacré dans l'accord à la mise en application", estimant que "cela va requérir un grand appui de la communauté internationale".
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