A cinq jours de sa prise de fonction vendredi, le président élu des Etats-Unis a multiplié les déclarations corrosives, en particulier sur l'Europe et l'Otan, qualifiée d'"obsolète", dans un entretien dimanche aux quotidiens britannique Times et allemand Bild.
Le milliardaire républicain a estimé que le Royaume-Uni avait eu "bien raison" de quitter une Union européenne selon lui dominée par l'Allemagne, a prédit que le Brexit serait un "succès" et que d'autres pays quitteraient l'UE.
Il a aussi jugé que la chancelière allemande, Angela Merkel, avait commis "une erreur catastrophique" en ouvrant son pays aux migrants en 2015 et a établi un lien entre cette politique controversée et l'attentat du 19 décembre à Berlin (12 morts).
Lors d'une conférence de presse à Berlin, Mme Merkel n'a pas souhaité répondre dans le détail, mais en a profité pour réaffirmer ses positions sur le lien transatlantique ou l'Europe post-Brexit.
"Je pense que nous, les Européens, avons notre destin dans nos propres mains. Je vais continuer de m'engager pour que les 27 États membres travaillent ensemble vers l'avenir (...) face aux défis du XXIe siècle", a-t-elle déclaré.
Avant elle, le vice-chancelier, le social-démocrate Sigmar Gabriel, avait souligné l'importance pour l'Europe de "ne pas tomber dans une profonde dépression" et de défendre avec "assurance" ses propres intérêts.
Ces propos faisaient écho à ceux tenus à Bruxelles à l'occasion d'une réunion des ministres européens des Affaires étrangères, entre appel au front uni de l'UE et volonté de dédramatiser.
"La meilleure réponse à l'interview du président américain, c'est l'unité des Européens", a plaidé le Français Jean-Marc Ayrault.
Pour sa part, l'Otan a redit sa "confiance absolue" dans le maintien d'un "engagement fort" des Etats-Unis, au moment où certains pays européens - en particulier ceux situés sur le flanc est de l'Alliance - s'inquiètent de l'arrivée de Donald Trump à la Maison Blanche, synonyme de possible détente avec Moscou.
'Inquiétude' à l'Otan
Aux quotidiens The Times et Bild, M. Trump a affirmé que l'Otan était "obsolète parce qu'elle a été conçue il y a des années et des années" et "parce qu'elle ne s'est pas occupée du terrorisme". En outre, a-t-il accusé, les pays membres "ne payent pas ce qu'ils devraient".
Seuls cinq des 28 pays de l'Otan (Etats-Unis, Royaume-Uni, Estonie, Grèce, Pologne) respectent un niveau de dépenses militaires au moins équivalent à 2% de leur Produit intérieur brut, le seuil souhaité par l'Alliance. Les Etats-Unis garantissent environ 70% des dépenses militaires de l'organisation.
En sortant d'un rendez-vous avec le chef de l'Otan Jens Stoltenberg, le ministre allemand des Affaires étrangères, Frank-Walter Steinmeier, n'a pas caché l'"inquiétude" de l'Alliance atlantique.
Parler d'une Otan "obsolète", a-t-il toutefois relevé, c'est "en contradiction avec ce que le (futur) ministre de la Défense américain a dit lors de son audition à Washington il y a seulement quelques jours".
James Mattis, ancien général des Marines choisi par M. Trump pour diriger le Pentagone, a mis en garde contre la volonté du président russe, Vladimir Poutine, de "casser" l'Otan.
Une UE 'en mode attente'
Des déclarations de nature à rassurer les Européens attachés au maintien d'une position intransigeante avec Moscou, en plein conflit ukrainien.
Un diplomate européen a décrit à l'AFP une UE "en mode attente" face à des positions parfois contradictoires dans la future administration des Etats-Unis. "Un président n'est pas seul" pour décider, se rassure un autre diplomate.
Le chef de la diplomatie espagnole, Alfonso Dastis, a souhaité donner du temps à Donald Trump pour qu'il "apprenne à connaître l'UE et l'Otan de l'intérieur". "J'espère qu'il changera d'avis", a-t-il souhaité.
Donald Trump a évoqué dimanche la possibilité d'un accord de réduction des armements nucléaires avec la Russie en échange de la levée des sanctions qui la frappent, alors que l'UE vient de reconduire ses sanctions économiques.
Concernant l'accord de 2015 sur le nucléaire iranien, lui aussi fragilisé par la transition Obama/Trump, la chef de la diplomatie de l'UE, Federica Mogherini, a souligné que l'Union le jugeait "extrêmement important" et continuerait à oeuvrer à son "respect".
Pour le ministre luxembourgeois des Affaires étrangères, Jean Asselborn, il existe désormais une "possibilité de montrer à M. Trump que l'Europe n'est pas seulement une communauté solidaire" mais qu'elle "prend les Affaires étrangères au sérieux et sait bien que si on détruit la politique étrangère, les conséquences en seront d'une très grande portée".
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