"C'est une mauvaise nouvelle pour les Cubains, parce que c'était une très bonne solution pour nous", regrette Tatiana Rodriguez, coiffeuse de 32 ans rencontrée le long du Malecon, le boulevard de bord de mer havanais qui fait face à la Floride, à quelque 150 km plus au nord.
Aux côtés de ses deux fils, Tatiana raconte en désignant la mer qu'elle a été tentée de traverser clandestinement le détroit de Floride, mais "la peur" de cette périlleuse traversée, des courants violents et des récits de compatriotes dévorés par les requins, l'a retenue.
Pourtant, depuis une loi votée en pleine guerre froide en 1966, les illégaux Cubains jouissaient d'un passe-droit unique aux Etats-Unis, où ils obtenaient automatiquement le statut de résident permanent au bout d'un an et un jour, ainsi que diverses aides sociales (logement, travail, couverture médicale, etc.).
Maintenant "il (Barack Obama) a renoncé à cela, on se retrouve sans opportunité", peste encore Tatiana. "C'est mauvais, hyper mauvais".
A l'annonce de ce revirement qui vise à consolider le rapprochement engagé fin 2014 entre les deux anciens ennemis de la guerre froide, le gouvernement cubain a immédiatement affiché sa satisfaction. Quelques heures après, la nouvelle était sur toutes les lèvres dans les rues de la capitale cubaine.
- 'On n'émigre pas pour le plaisir' -
Alors que l'étudiant trentenaire Alexander se disait "un peu surpris" par cette décision qui va "empêcher certaines familles de se recomposer", le chauffeur de taxi à trois roues Juan Gonzales y voyait un geste dans le bon sens, en vue de la réconciliation entre les deux pays.
"C'est très bien pensé par Obama (...), c'est une trêve entre notre pays et les Etats-Unis, on verra si cela permet d'améliorer les choses", souligne cet homme de 46 ans.
Depuis la révolution castriste de 1959, plus de deux millions de Cubains ont pris le chemin de l'exil aux Etats-Unis, principalement en Floride.
Et depuis l'annonce du dégel, les départs ont repris de plus belle, nourris par la crainte de la décision, finalement prise jeudi, de supprimer ces avantages exceptionnels réservés aux clandestins cubains.
Selon l'institut Pew Research Center, qui cite des données officielles américaines, le nombre de migrants cubains ayant rejoint les Etats-Unis est passé de 24.278 en 2014 (année fiscale) à 43.159 en 2015, puis 46.635 en 2016 (seulement 10 mois comptabilisés).
Pour l'entrepreneuse indépendante Nilka Ocampo, 26 ans, la décision d'Obama peut être vue de deux manières.
"D'un côté c'est une bonne chose puisqu'on ne courra plus le risque de mourir, comme tant de Cubains noyés. Ils sont probablement plus nombreux à mourir (en mer) qu'à toucher terre", avance la jeune femme, interrompue en train de converser avec des proches installés en Floride dans une zone wifi de la vieille ville.
Mais en même temps, estime-t-elle, beaucoup de Cubains vont se trouver dans une impasse. "Le Cubain émigre à la recherche d'une vie meilleure, il n'émigre pas pour le plaisir, il le fait par nécessité", rappelle-t-elle.
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