Clément, 7 ans, doit se faire retirer sous anesthésie générale ses diabolos dans les oreilles posés à la suite d'otites à répétition. Une intervention redoutée par le petit Parisien qui, comme sept autres enfants âgés de 4 à 10 ans, participe à un atelier pour "dédramatiser" ce passage au bloc, prévu le lendemain.
Méfiant face à l'infirmière anesthésiste qui l'accueille, Clément, la mine renfrognée, accepte finalement après quelques minutes d'échange de choisir les Playmobil qui le représenteront avec ses parents et son doudou. Des avatars qu'il dépose sur une maquette reproduisant jusque dans les moindres détails les différentes salles dans lesquelles il cheminera le lendemain, de la chambre à la salle de réveil.
"Le but est de rendre les enfants acteurs de leurs soins, de répondre à leurs angoisses, qui souvent se concentrent sur la peur d'être séparés de leurs parents, et de leur faire repérer les lieux", explique l'infirmière Joëlle Kinderf, responsable de cet atelier qu'elle a créé en 2013 avec ses collègues du service de chirurgie.
Chaque étape est expliquée avec des mots soigneusement choisis pour ne pas faire peur. "Il n'est pas question de parler de piqûre ou de prise de sang, de même on n'aborde pas l'opération en elle-même qui intéresse peu les enfants, même si on ne ment jamais sur ce qui les attend", explique Mme Kinderf.
"Le stress a énormément de conséquences sur la douleur ainsi que sur la capacité de récupération et le développement psychologique", insiste la soignante.
"Vaisseau spatial"
A ses côtés, une auxiliaire de puériculture demande aux enfants ce que l'on doit emporter quand on s'apprête comme eux à partir pour un "voyage extraordinaire".
Du papier toilette, un pyjama, des chaussures, un doudou: les réponses fusent et provoquent les rires des parents qui doucement se détendent face à des soignantes rivalisant d'humour et d'imagination pour familiariser leur public à l'univers hospitalier.
Le bracelet contenant l'identité des enfants? Une carte d'embarquement. Le brancardier? Un super pilote de vaisseau spatial. La perfusion? Une paille. Le masque des soignants? Un subterfuge pour faire des grimaces sans être vu, assurent-elles en revêtant progressivement la tenue qu'elles porteront le jour J: calot, masque et chasuble.
L'univers de l'hôpital est "brutal et peut paraître agressif, y compris pour les parents, avec par exemple les alarmes stridentes des machines", relève la puéricultrice Karine Valade, convaincue que cette préparation permet "d'éviter certains conflits" ainsi qu'un rejet de l'hôpital.
Matthias, 4 ans et demi "qui a connu plus d'opérations que fêté d'anniversaires", déplore sa maman, ne se laisse pas amadouer. Rétif à tous les exercices qu'on lui propose, le petit garçon, qui souffre d'une grave malformation de l'oesophage et doit bientôt subir une nouvelle intervention, "sait trop bien ce qui l'attend", analyse sa maman. Il sera orienté vers un psychologue.
"Il sait que le voyage ne va pas être magique", explique cette mère qui regrette que son fils n'ait pas suivi cet atelier plus tôt pour éviter le blocage, lié notamment à une intubation mal vécue.
"Mais c'est bien au moins pour son grand-frère de 9 ans dont il est très proche", remarque la maman. Valentin en effet est rassuré: Matthias n'étouffera pas sous son masque à oxygène.
"Notre but est d'éviter que l'expérience soit traumatisante afin que l'enfant ose revenir et ne cache pas ses symptômes, ce qui arrive souvent chez les adolescents souffrant d'une maladie chronique", relève Mme Kinderf.
L'atelier est d'ailleurs décliné pour eux et aborde notamment l'estime de soi et la pudeur.
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