La révolution est en marche, même si quelques dents grincent. Viktor Kassai est peut-être entré dans l'histoire: l'arbitre hongrois a accordé pour la première fois dans une compétition organisée par la Fifa un penalty grâce à un dispositif d'assistance vidéo, lors de la demi-finale du Mondial des clubs remportée par le club japonais des Kashima Antlers face aux Colombiens de l'Atlético Nacional (3-0).
On joue la 27e minute de jeu: sur un coup franc indirect, le défenseur des Antlers Daigo Nishi s'écroule dans la surface, fauché. L'arbitre, dans un premier temps, laisse l'action se poursuivre, mais son assistant vidéo Danny Makkelie l'alerte d'un possible incident de jeu. M. Kassai décide alors de visionner les images sur le moniteur installé au bord du terrain. Et accorde un penalty aux Japonais, converti par Shoma Doi (1-0, 33e). Au grand dam des joueurs de l'Atlético Nacional, comme Mateus Uribe qui estime que cette décision "a retourné la rencontre à 180 degrés".
"Auparavant, l'arbitre assistant vidéo a correctement appliqué la consigne de prudence concernant l'éventuelle position de hors-jeu du joueur sur lequel la faute a été commise", a précisé la Fifa dans un communiqué, pour éteindre toute polémique.
Décision en mars 2018
"La technologie a bien fonctionné et le dernier mot est revenu à l'arbitre, ce qui sera toujours le cas dans la mesure où les (arbitres assistants vidéo) ont pour unique fonction d'assister l'homme en noir", a déclaré Massimo Busacca, directeur de l'arbitrage de la FIFA, cité dans le même communiqué.
Cette expérimentation a été rendue possible par l'IFAB, organisme garant des lois du jeu, qui avait autorisé en mars des tests en conditions réelles de matches pendant deux ans, premier pas vers un changement majeur dans l'histoire du football.
Les quatre cas où l'assistant vidéo peut avoir son mot à dire à l'arbitre central, selon le protocole d'expérimentation de l'IFAB, sont: but marqué, carton rouge, penalty, doute sur l'identité d'un joueur à avertir.
"On va multiplier (les tests) pendant deux ans et, en mars 2018, on décidera", avait déclaré fin novembre le président de la Fifa Gianni Infantino dans une interview au quotidien Le Parisien. "J'espère qu'on aura l'arbitrage vidéo pour la Coupe du monde 2018".
Plusieurs pays ont déjà été choisis pour tester l'assistance vidéo: les Etats-Unis, l'Allemagne, la France, l'Australie, le Brésil, l'Italie, les Pays-Bas et le Portugal, chacun sous l'égide de sa fédération et/ou de sa ligue professionnelle.
Des experts pas convaincus
Si certains observateurs, comme l'ancien arbitre international français Bruno Derrien, pensent que ce dispositif va "éliminer de manière indéniable les grossières erreurs", il est toutefois loin d'être la panacée.
"Tout ceux qui pensent que la vidéo permettra de faire zéro erreur se mettent le doigt dans l'oeil. Cela restera toujours un problème d'interprétation. Il y a des cas où vous mettez 10, 15 ou 20 arbitres devant une image, vous n'aurez pas forcément l'unanimité sur la décision", explique-t-il à l'AFP.
Autre limite pointée par les joueurs de l'Atletico Nacional, le temps conséquent -près de quatre minutes- pris par l'arbitre entre la faute présumée et l'arrêt du match pour visionner la vidéo: "On s'éloigne de l'essence du football", s'est offusqué le capitaine Alexis Henriquez.
Même l'entraîneur des Kashima Antlers, Masatada Ishii, bénéficiaire de cette décision, a exprimé ses "doutes" sur le procédé "s'il faut arrêter la partie à plusieurs moments".
"Si dans la continuité de l'action vous avez un but qui est marqué de l'autre côté et qu'ensuite l'arbitre vidéo appelle son collègue pour dire: +Il faut revenir à l'action précédente+, je crois qu'on ajoutera de la confusion", remarque auprès de l'AFP Joël Quiniou, ancien arbitre international et consultant pour RMC. Et M. Quiniou de pointer le risque "d'envenimer la tension sur le terrain". Les polémiques ont de beaux jours devant elles.
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