Depuis que le groupe extrémiste État islamique (EI) a pris le contrôle de leurs villes il y a deux ans et demi, ces enfants n'avaient pas vu une école.
De nombreux parents avaient refusé de les envoyer suivre le cursus du "califat" autoproclamé par l'EI où les armes et la violence occupaient une place plus importante que la lecture ou le calcul.
"Ce n'était que des histoires de munitions, des entraînements militaires et des idées radicales", résume la mère d'une fillette, Sara Hassan.
Après ce long hiatus, réadapter aujourd'hui ces nouveaux écoliers à la scolarité et à la camaraderie est un vrai défi, explique à l'AFP Khaoula Hassan, institutrice de 33 ans qui officie dans des tentes du camp de déplacés d'al-Jadaa transformées en salles de classe.
Mais, depuis qu'ils ont repris le chemin de cette école improvisée, "ils commencent désormais à être attentifs et nous apprenons les comportements à avoir en classe", affirme cette habitante de Qayyarah, la grande ville la plus proche, qui enseigne depuis une dizaine d'années.
Au début, se souvient-elle, ils s'asseyaient les uns à côté des autres en fonction de leurs villages d'origine, chacun restant avec les siens. Pour "créer de la fraternité", elle a dû mélanger les rangs.
Chaque jour, environ 250 enfants sont accueillis ici, même si les classes se dégarnissent parfois au gré des retours de déplacés vers leurs villes et villages, au fur et à mesure que les troupes irakiennes progressent et font reculer l'EI, affirme Mohammed Othmane qui dirige l'une des deux écoles tenues par NCSON, une ONG irakienne.
Violence et colère latentes
Mais avec les combats qui font rage dans certaines zones, alors que l'armée et la police irakiennes resserrent leur étau autour de Mossoul, la capitale auto-proclamée de l'EI plus au nord, il y a parfois des flux de nouveaux élèves. "Hier, on a accueilli 440 enfants", formés à la lecture et à l'écriture, en arabe et en anglais, poursuit M. Othmane.
Il y a aussi des leçons de mathématiques, de sciences ainsi que d'éducation islamique --une façon aussi de tenter de lutter auprès des nouvelles générations contre l'endoctrinement et l'extrémisme que l'EI a longtemps imposés par la force dans les zones qu'il tenait.
Et, parce que les élèves vivent dans un camp de déplacés en zone de guerre, il y a aussi des sessions de sensibilisation à l'hygiène et à la vigilance face aux engins explosifs que les hommes du "califat" ont disséminé dans le nord irakien.
Pour Noura al-Bajari, députée irakienne de la province de Ninive, où se trouve Mossoul, l'éducation est une priorité dans la région où plus de deux années scolaires ont déjà été perdues.
"Ces enfants ne parlent que de sang et de combats, il leur faut un programme qui se concentre sur les droits de l'Homme et la vie en communauté", plaide-t-elle auprès de l'AFP, de retour d'une visite dans les camps de déplacés disséminés dans sa province.
Dans la petite école d'al-Jadaa, la violence reste malgré tout latente. Ici ou là, un enfant s'énerve et se saisit d'un objet ou d'une pierre pour s'en prendre à un petit camarade. Chez les enfants déplacés du nord irakien, la colère est loin d'être apaisée.
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