A 67 ans, Martine Gervais-Jourde aimerait enfin pouvoir prendre sa retraite. Mais cette fleuriste de Malestroit (Morbihan), qui n'emploie plus qu'une salariée, est contrainte de poursuivre, ne trouvant ni repreneur pour son affaire, ni acheteur pour le bâtiment qui abrite son magasin.
"Reprendre un petit commerce en centre-ville, ce n'est même pas la peine", souffle-t-elle. "Les fleuristes ferment à tour de bras, la crise a tout changé", ajoute-t-elle.
Comme elle, des milliers de petits patrons éprouvent d'infinies difficultés à passer la main, et poursuivent de fait leur activité. Un phénomène particulièrement problématique dans le secteur du petit commerce, tandis que pour les autres types de PME, les cédants sont moins nombreux.
"On estime que sur 185.000 entreprises qui pourraient être mises chaque année sur le marché, seules 60.000 le sont vraiment", explique à l'AFP la députée socialiste Fanny Dombre-Coste, auteur en 2015 d'un rapport remis au gouvernement sur la transmission d'entreprises. "Et parmi elles, seules 30.000 arrivent au bout de la cession, quand 30.000 autres disparaissent", ajoute-t-elle.
Or, ces disparitions sont lourdes de conséquences pour les salariés des entreprises concernées. "Si on pouvait fluidifier le marché de la transmission, on pourrait sauvegarder 750.000 emplois et en créer des milliers d'autres", assure l'élue, qui souligne aussi les risques de "disparition de savoir-faire et de désertification" que font courir ces défaillances.
Le problème préoccupe d'autant plus les pouvoirs publics que la question va se faire plus criante au fur et à mesure du vieillissement de la population de petits patrons.
Dans un rapport réalisé en juin 2016, la Chambre de commerce et d'industrie de Paris Ile-de-France rappelait que 62% des chefs d'entreprises ont plus de 50 ans et que la part de ceux qui ont plus de 60 ans ne cesse de croître. "Dans les dix prochaines années, ce sont 700.000 chefs d'entreprises qui sont susceptibles de céder leur affaire", indique Mme Dombre-Coste.
Mauvaise préparation
Les raisons de l'échec des transmissions ? En premier lieu, une mauvaise préparation de ces projets. "Bien souvent, les chefs d'entreprises s'en préoccupent trop tard", déclare la députée, qui estime à "au minimum cinq ans" le délai pour mettre en place une cession.
Dans une étude sur les transmissions d'entreprises de taille intermédiaire publiée en 2015, la banque publique d'investissement Bpifrance estimait quant à elle ce délai à près de dix ans, un tel projet impliquant en particulier d'adapter la gouvernance de l'entreprise.
"Il faut se préparer à la transmission, cela ne se fait pas du jour au lendemain", abonde Nathalie Darras, qui a repris l'an dernier Tartaix, une petite société de vente de métaux au détail et d'outillage basée à Paris. Avant d'arrêter son choix, elle a étudié des dizaines de dossiers d'entreprises à céder. "On voit la différence entre ceux qui l'ont préparée et ceux qui ne l'ont pas fait", témoigne-t-elle auprès de l'AFP.
Autre problème: les cédants, en particulier ceux qui partent à la retraite, surévaluent très souvent la valeur de leur entreprise, le montant tiré de la cession constituant souvent une bonne part de leurs futurs revenus.
Enfin, les patrons sont aussi confrontés à des obstacles fiscaux et réglementaires qui les dissuadent pendant longtemps de se lancer dans le projet.
Dans cette optique, les professionnels de la transmission (experts-comptables, notaires, commissaires aux comptes, avocats et Chambre de commerce et d'industrie de Paris Ile-de-France), ont dévoilé lundi au salon Transfair 15 propositions destinées à doper la transmission, allant de la simplification du régime des cessions de valeur mobilière à la suppression ou l'aménagement de l'impôt sur la fortune (ISF), en passant par la facilitation de la transmission d'entreprise aux salariés.
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