Politiquement, la défaite d'Hillary Clinton est bien sûr un revers pour le président démocrate tant il était monté en première ligne pour son ancienne secrétaire d'Etat, sillonnant l'Amérique, mettant son charisme au service d'une candidate qui en manquait cruellement.
Mais au-delà de l'affrontement classique entre les deux grands partis américains, le succès du milliardaire populiste de 70 ans est douloureux pour Barack Obama.
Comme si ce président intellectuel, calme et raisonné, qui revendiquait sans détour une forme d'optimisme et appelait à ne jamais céder aux sirènes du cynisme, avait mal lu une partie de l'Amérique, ses réflexes, ses peurs, ses angoisses.
Comme s'il n'avait pas su prendre la température de cette "autre Amérique", celle notamment des blancs laissés sur le bord de la route, effrayés par le tourbillon de la mondialisation et d'une société qui évolue trop vite pour eux.
A court terme, le président démocrate, qui achève sa présidence avec un popularité au zénith, peut légitimement s'interroger sur ce qui restera de son bilan après un mandat Trump.
Ce dernier a promis haut et fort de supprimer ou détricoter la plupart de ses réformes ou avancées emblématiques: la réforme de l'assurance santé (Obamacare), la lutte contre le changement climatique (Trump a promis d'"annuler" l'accord de Paris conclu fin 2015), l'accord de libre-échange Asie-Pacifique...
Le 44e président des Etats-Unis l'avait dit sur tous les tons, avec une virulence qu'on ne lui connaissait pas: le magnat de l'immobilier était à ses yeux un danger pour la démocratie.
"Nous ne pouvons nous permettre d'élire ce type ! Ce n'est pas possible ! Ce n'est pas possible !": son cri du coeur à Las Vegas, quelques jours avant le scrutin, résumait ses sentiments.
"Le sort de la république est entre vos mains", ajoutait-il quelques jours plus tard, dans un registre plus solennel.
'Ce n'est pas possible!'
Politiquement, humainement, difficile d'imaginer deux personnages publics plus dissemblables que Barack Obama et Donald Trump.
La vision du monde bien sûr. Mais aussi la relation aux femmes, à la famille, à l'argent, aux institutions. Le style, le mode d'élocution, le choix des mots.
Obama, né d'un père kényan et d'une mère américaine, a tracé son chemin jusqu'aux prestigieuses universités de Havard et Yale. Trump a hérité des millions de son père, a développé un empire basé sur les hôtels, les casinos, et l'optimisation fiscale.
Obama l'universitaire aime les longs raisonnements structurés, parfois jusqu'à l'excès, les discours ciselés. Trump l'homme d'affaires est impulsif, spécialiste des formules courtes, souvent agressives, parfois vulgaires.
"C'est la démocratie même qui est en jeu", répétait Obama ces dernières semaines en campagne, déroulant un réquisitoire cinglant contre la candidat républicain.
"Le savoir-vivre est en jeu dans cette élection. La tolérance est en jeu. La courtoisie est en jeu. L'honnêteté est en jeu. L'égalité est en jeu. La bienveillance est en jeu", ajoutait-il sur une tonalité différente.
Car Barack Obama avait aussi des raisons plus personnelles de stopper net les ambitions politiques du fantasque homme d'affaires.
En 2011, Trump n'était pas encore candidat à la Maison Blanche mais avait déjà goût prononcé pour la lumière, les polémiques, et les théories du complot.
Pendant des mois, l'homme d'affaires avait alimenté une campagne visant à mettre en doute le fait que le premier président noir des Etats-Unis était né sur le territoire américain.
Exaspéré - "Nous n'avons pas de temps pour ce genre de bêtises" -, Obama avait fini par organiser une conférence de presse pour publier son acte de naissance complet.
Quelques jours plus tard, il profitait de la présence de l'extravagant milliardaire lors du dîner de l'Association des correspondants de la Maison Blanche pour dire, avec une jubilation évidente, ce qu'il pensait du personnage.
"Le Donald", s'amusait-t-il, "peut maintenant enfin s'intéresser aux vrais problèmes: Avons-nous fait semblant d'envoyer un homme sur la Lune ? Que s'est-il passé à Roswell ?".
Un peu plus de cinq ans plus tard, Barack Obama s'apprête à céder sa place dans le Bureau ovale, "une fonction sérieuse", n'a-t-il eu de cesse de rappeler, à un ex-animateur de télé-réalité qui a alimenté, pendant des années, une campagne de rumeurs à connotation raciste à son encontre.
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