Au matin du 4 novembre 1966, le fleuve Arno quitte son lit, inondant Florence et nombre de ses trésors. 50 ans après, la ville célèbre ses "Anges de la boue", des volontaires qui avaient accouru du monde entier pour sauver son inestimable patrimoine artistique.
"Il n'est pas un Florentin qui ne soit ému à l'évocation du désastre", raconte à l'AFP Antonina Bargellini, florentine de 72 ans dont le père n'était autre que le maire de la ville au moment de l'inondation historique de novembre 1966.
"Nous habitions à l'époque dans le quartier de l'église Santa Croce, qui se trouve au-dessous du niveau de l'Arno, et ce jour-là, avec mes frères et soeurs, nous avons vu l'eau envahir le jardin puis monter jusqu'à cinq mètres de hauteur", raconte-t-elle.
Antonina garde un souvenir vivace et poignant des heures et des jours qui suivirent, "du fleuve rugissant battant contre les portes", de son père appelé en urgence sur le célèbre Ponte Vecchio qui menaçait de s'écrouler, de la solidarité entre les habitants privés de vivres, d'eau potable et d'électricité.
"C'était comme dans les anciennes cités médiévales où les gens se parlaient de maison en maison pour faire circuler une information", raconte-t-elle.
Deux jours plus tard, après le retrait du fleuve, la cité toscane n'est plus qu'un immense marécage de boue, mélange de débris et de mazout échappé des caves. L'inondation a fait 34 morts, 17 à Florence et autant dans le reste de la province.
- 'Nous souvenir d'eux' -
L'eau est entrée partout, jusqu'aux premiers étages des maisons mais aussi dans les églises, la bibliothèque centrale, les musées, provoquant des dommages immenses au patrimoine artistique de la ville, l'un des plus riches de la planète.
Mais la désolation laisse rapidement place à un immense élan de générosité impliquant non seulement des Florentins mais aussi des volontaires, surtout des étudiants, qui affluent de toute la Péninsule et du monde entier. On les appellera "Les Anges de la boue" ("Gli Angeli del fango" en italien).
C'est pour rendre hommage à tous ceux qui spontanément s'étaient mobilisés pour venir sauver livres, tableaux et oeuvres d'arts que la ville de Florence et la région de Toscane ont voulu les réunir, un demi-siècle après la catastrophe.
Plusieurs centaines d'entre eux, sur les quelque 10.000 recensés il y a 50 ans, sont attendus le 4 novembre à la suite d'un appel international lancé sur internet.
"Nous voulons nous souvenir d'eux et les remercier tous pour conserver les histoires et la mémoire de cet événement qui fait partie de notre identité", a déclaré le maire de Florence, Dario Nardella.
Point d'orgue des festivités, une réception sera donnée en leur honneur dans la somptueuse salle des Cinq-Cents du Palazzo Vecchio, en présence du président de la République italienne, Sergio Mattarella.
- 'Beaucoup de nostalgie' -
Aujourd'hui âgée de 71 ans, Susan Glasspool y prendra part, sans pour autant avoir à faire le voyage depuis sa Cornouailles natale puisqu'elle n'a plus quitté la Toscane après ce mois de novembre 1966 où elle rencontra son futur mari pendant les opérations de déblaiement de l'Académie des Beaux-Arts.
"Je crois que les +Anges de la boue+ éprouvent, comme moi, beaucoup de nostalgie, et je suis curieuse de savoir s'ils ont eu l'occasion de ressentir à nouveau ce sentiment de solidarité que nous avions éprouvé à l'époque", a raconté la Britannique à l'AFP.
Son souvenir le plus émouvant ? "Lorsque j'ai retrouvé un morceau de la maquette originale en bois de la coupole de la cathédrale, oeuvre de Filippo Brunelleschi". Réalisée en 1420, cette réplique en miniature du célèbre dôme, attribuée à l'architecte de la Renaissance, est exposée au Musée de l'Œuvre de Florence.
En cinquante ans, bon nombre des quelque 1.800 oeuvres d'art et des quatre millions de livres récupérés par les "Anges de la boue" ont retrouvé leur emplacement d'origine. Mais nombreuses sont les pièces qui, aujourd'hui encore, errent dans des dépôts en attendant une hypothétique restauration.
Tel n'est plus le cas de "La Dernière Cène", une toile géante (6 m × 2,61 m) signée Giorgio Vasari (1511-1574), engloutie elle-aussi dans l'inondation. Après dix ans d'une minutieuse restauration, elle retrouvera sa place, le 4 novembre, dans la Basilique Santa Croce.
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