Après un démarrage en trombe, avec une hausse de 0,7% du Produit intérieur brut (PIB), l'activité économique a connu un véritable trou d'air entre avril et juin, dont l'ampleur n'avait pas été anticipée, ni par le gouvernement ni par les analystes: dans sa dernière estimation publiée fin septembre, l'Insee a annoncé que le PIB avait baissé de 0,1% sur cette période. Le premier recul enregistré depuis l'hiver 2013.
Pour le troisième trimestre, l'institut statistique prévoit désormais une hausse de 0,2% du PIB, suivie au quatrième trimestre d'une progression de 0,4%, ce qui mènerait à une croissance de 1,3% sur l'ensemble de l'année.
Un chiffre inférieur à ce qui était prévu à l'origine par l'Insee, soit 1,6%. Mais aussi inférieur au pronostic officiel du gouvernement, fixé à 1,5%.
Après l'annonce des dernières prévisions de l'Insee, le ministre de l'Economie et des Finances Michel Sapin avait toutefois laissé entendre que la croissance pourrait ne pas atteindre l'objectif gouvernemental, en déclarant qu'elle serait "aux alentours de 1,5%".
Pour le troisième trimestre, les prévisions des analystes convergent peu ou prou avec celles de l'Insee.
"Nous faisons l'hypothèse d'un rebond après le creux du deuxième trimestre, mais qui serait modéré", déclare à l'AFP Axelle Lacan, économiste chez Coe-Rexecode, qui prévoit une progression de 0,3% du PIB entre juillet et septembre.
Le deuxième trimestre avait pâti de plusieurs facteurs temporaires, dont l'annonce très tardive de la prolongation de la mesure de suramortissement fiscal sur l'investissement productif: anticipant un arrêt de la mesure, les chefs d'entreprises y avaient eu massivement recours au début de l'année, ce qui s'était traduit par une nette décélération ensuite.
De fait, "on s'attend à du mieux du côté de l'investissement productif", indique Axelle Lacan. Par ailleurs, "il y a eu d'autres éléments favorables: les taux d'utilisation des capacités de production se sont redressés", souligne-t-elle.
Du côté des ménages, un "léger mieux" devrait aussi être observé en ce qui concerne la consommation en biens, prédit l'économiste.
Mais alors que la consommation des ménages a vraiment été "le moteur de la croissance française ces dernières années", il semblerait qu'elle ait perdu "un peu de puissance", observe-t-elle.
- "Croissance molle" -
"Ca devrait aller en s'accentuant, compte tenu de nos prévisions de remontée graduelle des prix du pétrole, avec l'effet défavorable que ça a sur le pouvoir d'achat", prévient-elle.
Pour Eric Heyer, de l'Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE), la France reste depuis près de deux ans sur le même rythme de croissance. "Globalement, la croissance se situe autour de 0,3-0,4% en moyenne par trimestre", déclare-t-il à l'AFP.
"On est dans un rythme normal", poursuit-il. Mais dans le contexte post-crise économique, il faudrait être "au-dessus du rythme normal pour que la conjoncture résorbe une partie des déséquilibres provoqués par la crise", explique-t-il. De fait, avec de tels chiffres, aussi bien le chômage que le déficit se réduisent très faiblement.
Petite lueur d'espoir toutefois: le chômage a connu une baisse historique en septembre, de 1,9%. Et le moral des ménages s'est légèrement redressé en octobre.
"On est sur une croissance qui reste très, très molle", estime aussi Christopher Dembik, chef des études macroéconomiques de Saxo Bank.
"Il y a un contexte global qui est défavorable, surtout dans le secteur de l'hôtellerie et de la restauration", note-t-il. Le troisième trimestre avait démarré avec l'attentat de Nice qui a ébranlé le secteur.
"Les entreprises ont une attitude très attentiste qui est plus liée au contexte économique global et aux attentats qu'à la perspective des élections et de l'instabilité fiscale qui pourrait s'ensuivre", indique-t-il.
Quand bien même l'Hexagone enregistrerait une croissance de 1,3% ou même un peu plus sur l'ensemble de 2016, "cela sera très négatif si on ose comparer à l'Allemagne", estime l'économiste, se référant aux bons indicateurs de climat des affaires parus outre-Rhin.
"On va de nouveau avoir ce décalage français-allemand qui devrait être assez important cette année", déplore-t-il.
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