Le campement, en plein démantèlement, s'est vidé de la plupart de ses habitants. Mais des migrants, encore présents mercredi soir lorsque les autorités ont fermé le "sas" d'enregistrement, ont passé la nuit près de ce hangar ou dans la lande. Parmi eux, beaucoup se disent "bambinos", mineurs.
Jeudi au petit matin, ils sont ainsi au moins une centaine à faire la queue, transis de froid, pour s'enregistrer, espérant profiter des accords franco-britanniques sur le regroupement familial. En vain : le "sas" ne rouvrira pas.
"J'ai dormi ici, pas dans la +Jungle+, c'est trop dangereux. Et la +Jungle+, c'est fini", explique Abdelhadi, un Afghan de 16 ans.
"Vous ne pouvez pas rester ici, c'est fermé !", lancent des agents de l'État dans un mégaphone. Clameur de protestation dans les rangs. Les forces de l'ordre les éloignent jusqu'à 200 mètres du "sas", leur barrent la route puis, quelques minutes plus tard, les laissent se disperser sur la bande de sable qui longe la "Jungle".
Les jeunes hommes, qui jurent pour la plupart avoir 16 ou 17 ans et de la famille outre-Manche, se trouvent ainsi livrés à eux-mêmes, éloignés du "sas" et refoulés du cœur de la "Jungle" où les pelleteuses sont à l’œuvre.
Faute de savoir où aller, plusieurs dizaines échouent à la mi-journée devant les grilles fermées du Centre d'accueil provisoire (CAP), qui accueillait jeudi encore plus de 1.400 mineurs identifiés.
- Dans la nature -
Ils sont parfois aiguillés là par des associations. Mais impossible d'entrer : "Les vigiles ont dit non", regrette Ashud, un Afghan de 16 ans qui a dormi dans la "Jungle". Son ami Atef s'était enregistré mardi - "300 +bambinos+ dans la queue, des bousculades" - et dort désormais au CAP. Mais Ashud s'était découragé et s'en mord les doigts.
"Je n'ai pas l'autorisation pour les accueillir", rappelle Stéphane Duval, directeur du centre. Les autorités doivent "trouver une solution de mise à l'abri", réclame Céline Schmitt, porte-parole du HCR. Les associatifs semblent dépassés par la situation.
"On ne possède plus rien, on veut juste s'enregistrer" sur les listes de mineurs "pour aller en Angleterre", dit Naeem. Son ami Zaid n'a plus de passeport, "il a brûlé hier dans notre tente".
S'ajoutent à cela des arrivées récentes malgré les annonces de fin imminente du bidonville de Calais. "On voit plein d'enfants arrivés d'Italie, d'Allemagne", souffle une source proche du dossier.
"C'est une situation un peu chaotique, compliquée", renchérit Stéphane Duval, évoquant, lui, de très nombreux "gamins érythréens", "bien habillés", qui "n'ont pas vécu dans la boue du camp".
Illustrant l'effet "appel d'air" craint par les autorités, Ahmed, Soudanais de 17 ans, est arrivé mercredi de Paris. Il croyait pouvoir encore s'enregistrer jeudi : "C'est pas possible ?" Il rêve lui aussi d'Angleterre mais ses chances sont maigres : "Je n'y ai pas de famille. C'est tellement dur".
Les mineurs seront orientés vers des Centres d’accueil et d'orientation dédiés, sans passage par les conteneurs en dur du CAP, a assuré jeudi la préfète du Pas-de-Calais, Fabienne Buccio.
Dans l'après-midi, les jeunes déboussolés, poussés par des associations, quittent les abords du CAP. Certains s'évanouissent dans la nature. Les autres sont, progressivement, repoussés par la police à distance de la "Jungle". Un bus pour un centre d'accueil s'approche, plusieurs migrants montent. Pas Naeem, qui s'emporte : "Aucune humanité ici!".
En fin de journée, la police finit par leur signifier qu'ils peuvent circuler, mais pas vers l'entrée principale de la "Jungle". Ils s'y dirigent par une voie détournée.
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