Deux de ses quatre femmes, parties avec lui, viennent d'être transférées en France et mises en examen.
Kevin Guiavarch, 23 ans, avait rejoint la Syrie fin 2012, d'abord dans les rangs du Front Al-Nosra, la branche syrienne d'Al-Qaïda, avant d'intégrer l'organisation Etat Islamique (EI).
Outre ses activités de recruteur, il est aussi soupçonné d'avoir été directement impliqué aussi dans le financement de l'organisation.
Le jeune homme, qui dit être "repenti", avait écrit aux autorités françaises disant qu'il voulait rentrer en France, puis avait traversé en juin la frontière turco-syrienne avec ses quatre compagnes françaises et leurs six enfants avant d'être interpellé en Turquie où il est écroué dans l'attente d'un procès.
Les deux femmes, âgées de 26 et 34 ans, expulsées la semaine dernière de Turquie, ont été mises en examen vendredi à Paris pour "association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste", a appris mercredi l'AFP de sources proches de l'enquête.
La plus âgée, qui a quitté la France en même temps que Guiavarch et a eu avec lui deux enfants en Syrie, âgés de 10 mois et trois ans, a été placée en détention provisoire. L'autre, qui avait rejoint le jihadiste en 2014 et a eu également un enfant, a été laissée libre, sous contrôle judiciaire.
Deux autres compagnes, âgées de 22 ans, devraient être "prochainement remises aux autorités françaises avec leurs trois enfants", a indiqué une des sources.
La justice a renforcé ces derniers mois le contrôle des femmes de retour de Syrie.
"On a peut-être été trop scrupuleux au début en se disant que les femmes suivaient leur mari et se cantonnaient à des tâches ménagères en Syrie. Aujourd'hui, elles sont systématiquement interpellées à leur retour et placées en garde à vue", avait expliqué début septembre le procureur de la République de Paris, François Molins. A cette date, 59 femmes - dont 12 mineures - étaient mises en examen dans des dossiers de filières jihadistes ou de projets d'attentats, dont 18 placées en détention provisoire.
Le cas de Kevin Guiavarch avec ses quatre femmes françaises et leurs six enfants, dont certains sont nés sur le sol syrien et pourraient donc être considérés comme apatrides, reste "exceptionnel", souligne une source proche du dossier.
- "Circuit de financement" de l'EI -
D'autant que le jeune homme, d'origine bretonne, est "un gros poisson pour les services de renseignement" qui le soupçonnent d'avoir "mis en place un circuit de financement de l'organisation jihadiste", ajoute-t-elle.
La justice française s'est intéressée à lui en 2014, après le départ d'une mineure, originaire de Troyes (Aube) pour la Syrie. L'adolescente avait finalement été récupérée par sa famille en Allemagne, mais l'enquête avait établi que la jeune fille avait été recrutée, via les réseaux sociaux, par le jihadiste.
Les enquêteurs avaient aussi découvert qu'"il utilisait sa mère pour financer ses activités terroristes", d'après la source proche du dossier.
Cette dernière recevait des mandats en provenance notamment de plusieurs pays étrangers destinés à son fils et les envoyait, via Western Union, à un destinataire en Turquie, selon cette source.
En octobre 2014, elle avait été, avec son compagnon et une jeune femme, mise en examen et placée sous contrôle judiciaire.
Un mois plus tôt, l'ONU avait placé Kevin Guiavarch, en même temps qu'Emilie König, autre figure de premier plan de la mouvance jihadiste française, sur sa liste noire des combattants les plus dangereux, faisant ainsi l'objet de sanctions internationales et d'interdictions de voyager.
Son parcours comporte de nombreuses zones d'ombre. "Pourquoi a-t-il pris contact avec la France? Quelles sont ses motivations réelles? S'agit-il véritablement d'un repenti comme il le prétend?", s'est interrogée la source proche du dossier.
"Une fois qu'il sera jugé en Turquie. Nous espérons qu'il sera remis aux autorités françaises à qui il pourrait livrer des informations précieuses sur l'organigramme et le financement de l'organisation", a-t-elle souligné.
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