"Lundi, je prends le bus!" Dans la tente graffitée d'un "London Hotel" rose fluo, Kali montre en souriant sa valise posée sur le sol, près de celle de ses camarades du quartier des Soudanais.
"Tout le monde a préparé son sac depuis une semaine déjà, parce qu'on nous avait dit que ce serait le 17 et depuis, on attend", explique son voisin Mohammed, qui détaille avec minutie l'opération.
"Ca commence à 08H00, il y aura quatre files, mais ce n'est pas la peine d'y aller très tôt parce qu'ils feront d'abord partir les familles et je ne crois pas qu'ils nous laisseront dormir devant le hangar", explique cet ancien informaticien qui, à 43 ans, s'attend à partir "avec les vieux".
Lui a renoncé à passer en Grande-Bretagne. Mais certains de ses camarades ont préféré quitter le campement pour poursuivre ce rêve. "Personne ne devrait être obligé de bouger contre son gré", lance-t-il.
- "On verra lundi" -
Dans la rue principale, Lalarha semble plus perdu, même s'il dit avoir hâte de partir "pour la demande d'asile". "C'est sale ici, il n'y a pas de vêtements, pas d'argent, rien", dit-il en montrant les tongs dépareillées qui lui servent à arpenter la boue.
Les boutiques encore ouvertes -- beaucoup ont fermé ces dernières semaines -- continuent de débiter leurs marchandises. Deux pommes : un euro, un paquet de biscuits : 1,50 euro... Derrière ses cagettes de légumes, Zebi fait la moue.
"On nous avait dit que c'était pour la semaine dernière déjà!" fait remarquer cet Afghan, près de son collègue qui essuie un à un des piments pour les faire briller. Et si le démantèlement a lieu ? "J'irai dans la prochaine Jungle", assure-t-il.
Même son de cloche dans la boutique voisine, décorée d'une fresque "Do not destroy the Jungle", et où les étals proposent encore moult melons, canettes de soda et bouteilles d'huile. "On verra lundi, je n'y crois pas", assure le propriétaire afghan.
Dans les allées détrempées par une averse récente, les hommes défilent autour des lavabos et continuent de vaquer à leurs occupations : emplir des jerrycans, trouver la meilleure connexion pour leurs portables...
A l'Ashram Kitchen, point névralgique du campement pour ses distributions de repas, bénévoles et exilés ouvrent d'énormes boîtes de tomates pelées près d'un faitout géant où grésillent des oignons. "C'est l'avant-dernier jour", explique une bénévole, qui préfère ne pas donner son nom, "après, on fusionnera avec un autre collectif".
Elle grimace à l'évocation du démantèlement, "pas sûre que cela se passe bien". Même si "beaucoup de gens sont déjà partis", selon elle.
- Information -
A moins de 48 heures du coup d'envoi de l'opération, les volontaires restaient très présents sur place. "Il faut les informer de leurs droits , ils ne les connaissent pas!", lance Alex, une jeune Britannique venue remplir avec les migrants de petits formulaires à présenter à la police en cas d'interpellation.
Des bénévoles de l'association britannique Care 4 Calais passaient de tente en tente, pour informer les migrants et leur distribuer des numéros à joindre en cas d'urgence.
Mais "c'est très calme aujourd'hui", estime une jeune femme, occupée à distribuer des assiettes en polystyrène. "Les gens attendent. Quelque chose a changé".
La présence policière restait discrète dans l'après-midi, concentrée sur les lieux d'attroupement comme devant le centre d'accueil provisoire où les migrants se pressaient, dans l'attente des entretiens prévus pour les mineurs espérant rejoindre de la famille au Royaume-Uni.
Après une centaine samedi, une quarantaine devait partir de Calais pour la Grande-Bretagne dimanche matin, selon le directeur général de France Terre d'asile Pierre Henry.
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