Après quatre jours de conflit, la rédaction avait obtenu jeudi soir une première réunion avec la direction en présence de cinq syndicats, sur des revendications précises: le départ de l'animateur, mis en examen pour "corruption de mineur aggravée", mais aussi davantage de moyens pour la chaîne et de meilleures conditions financières pour ceux qui voudraient partir.
Dans l'après-midi, le CSA était intervenu en convoquant le n°2 de Canal+, Jean-Christophe Thiéry, pour lui demander des explications sur une situation jugée "inquiétante".
A l'issue de la rencontre, visiblement insatisfait de ses réponses, le CSA a publié un bref communiqué pour exprimer sa "vive préoccupation sur la pérennité de la chaîne" en estimant que l'avenir d'iTÉLÉ comptait davantage que le sort d'une personnalité, deux enjeux selon lui "disproportionnés".
Cette critique a fait l'effet d'une douche froide. "Au début de la réunion", a raconté l'un des représentants de la rédaction, "la direction nous a dit que tout s'était bien passé au CSA. C'est alors que nous avons reçu le communiqué. Nous leur avons montré. Ils ont été surpris, ils ne s'y attendaient pas".
- "A l'écoute" -
"Le ton n'était plus du tout le même que dans la matinée, ils étaient à l'écoute", a-t-il poursuivi. "La réunion a duré deux heures, il y a maintenant un début de discussion. Nous aurons une autre réunion vendredi à 12h30".
Une assemblée générale des salariés d'iTÉLÉ est prévue juste avant, vers 11h00, où devrait être votée la poursuite de la grève jusqu'à la fin des négociations, a-t-il ajouté.
iTÉLÉ est paralysée depuis lundi par la grève déclenchée par l'arrivée à l'antenne de Jean-Marc Morandini pour la tranche de 18-19 heures, une décision prise par Vincent Bolloré lui-même et sur laquelle la direction est jusqu'ici restée inébranlable, au nom de la présomption d'innocence.
Les autres médias qui employaient l'animateur, Europe 1 et NRJ 12, ont eux pris la décision inverse, en le retirant de l'antenne.
Le conflit s'est envenimé au-delà du cas Morandini car la chaîne, lourdement déficitaire, a déjà été secouée par une grève en juin lorsque la direction avait décidé de supprimer le quart des effectifs, au lieu du plan de relance promis par Vincent Bolloré fin 2015.
Privée de la plupart des pigistes, la chaîne d'info tourne à l'économie.
Depuis lundi, les journalistes votent chaque matin la grève à plus de 80% des voix, et de nombreuses autres rédactions et personnalités leur ont apporté leur soutien, avec le hashtag sur Twitter #JesoutiensiTele".
Jeudi matin, leurs représentants étaient ressortis découragés d'une réunion avec leur direction, qui s'apparentait selon eux à un dialogue de sourds.
La veille, le directeur général de Canal+ Maxime Saada avait affirmé que "Morandini est là et bien là", en dépit de la fuite de plusieurs gros annonceurs qui ont demandé à que leur spot ne passe plus sur son émission.
Le gouvernement a lui cherché à apaiser le conflit, mais sans intervenir : des journalistes d'iTÉLÉ ont été reçus jeudi au ministère de la Culture, qui s'est dit "très vigilant sur l'aspect social du conflit" et mercredi le porte-parole du gouvernement a appelé au "dialogue".
Paralysée par la grève, la chaîne du groupe Canal+ ne passe plus que des rediffusions depuis lundi: paradoxalement, la seule émission en direct est "Morandini Live", où Jean-Marc Morandini parle des médias, mais pas d'iTÉLÉ.
Les journalistes s’inquiètent plus largement d'une transformation de la chaîne d'info en chaîne de divertissement, d'autant que la direction envisage de faire appel aux frères Bogdanov ou à Éric Zemmour. Ils réclament un projet éditorial et davantage de moyens, à quatre jours du changement de nom en CNews.
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