La rédaction d'iTELE a reconduit mercredi la grève à 86% des voix, déçue par l'absence de propositions concrètes du directeur général de Canal+ Maxime Saada sur les projets éditoriaux.
Entre détermination et abattement, la rédaction réclame "un projet clair" et "une charte éthique", à quatre jours seulement du changement de nom d'iTELE en CNews. Ils espéraient mercredi que la direction ferait un geste, ne serait-ce que pour éviter de compromettre ce lancement.
Leurs revendications dépassent désormais largement la demande de suspension de Jean-Marc Morandini, à l'antenne depuis lundi, malgré sa mise en examen pour "corruption de mineurs aggravée".
Beaucoup prêtent au patron de Canal+ Vincent Bolloré, qui a imposé lui-même l'arrivée de Jean-Marc Morandini en dépit de l'opposition de la rédaction, l'intention de transformer leur chaîne d'info en chaîne de divertissement, et de pousser les récalcitrants à partir.
Un rassemblement de plus d'une centaine de journalistes organisé mercredi devant le siège a pris "des allures d'enterrement", selon des membres de la rédaction.
Dans la matinée, Maxime Saada a évoqué devant les journalistes des projets d'évolution de la chaîne, sans détailler de grille. Globalement, son objectif est qu'iTELE s'appuie sur les points forts du groupe Canal, sa maison-mère, pour renforcer les thèmes du sport, du cinéma, de la culture et de l'international, tout en restant une chaîne d'info généraliste en continu, a expliqué un porte-parole.
Un projet que les journalistes ont jugé très flou.
Pas question en tout cas de céder sur Morandini. Maxime Saada a annoncé seulement un changement d'horaire de l'émission "Morandini Live", qui passera dès lundi à 9 heures au lieu de 18 heures. "Il n'y aucun problème avec le contenu de l'émission", a-t-il lancé, selon des journalistes présents.
Pourtant des annonceurs fuient le programme: lors de l'émission de Morandini mardi, qui n'a rassemblé que 60.000 spectateurs, presque moitié moins que lundi, un spot des jus "Innocent" a été diffusé. Surpris, le groupe a demandé à la régie d'éviter désormais cette case, tout comme plusieurs autres annonceurs, cités dans un tweet de l'association Protection Enfance, dont Banque Populaire et Axa, a révélé Le Figaro.
Sur les nouveautés à venir, la direction a évoqué une émission de sport le week-end coproduite avec la filiale de Canal+, Infosport+, rappelant qu'iTELE perdait 25 millions d'euros par an, avec des revenus de 35 millions pour des coûts de 60 millions.
Le directeur de la chaîne, Serge Nedjar, qui va devenir aussi directeur de la rédaction, a cité comme "nouvelles pistes" l'arrivée d'Eric Zemmour et des frères Bogdanov, deux hypothèses décriées par la rédaction.
- 'Découragement' -
Certains songent à partir, d'autant qu'ils craignent que Vincent Bolloré ne veuille les remplacer par ceux de son quotidien Direct Matin, qui emménagent dans leurs locaux.
Une crainte alimentée par le dépôt par la société mère de Direct Matin, de la marque "C News Matin". Maxime Saada a lui démenti toute volonté de fusionner les rédactions mais évoqué de possibles "partenariats".
La direction a aussi prolongé jusqu'au 4 novembre la possibilité de partir dans le cadre d'une "clause de conscience" (avec indemnités) pour ceux qui refuseraient de travailler avec Jean-Marc Morandini.
"Il y a beaucoup de tristesse, de découragement et surtout le sentiment d'une incompréhension sur tous les sujets et d'une totale absence de confiance mutuelle. Le début (de la réunion) a été très tendu. Des gens étaient en pleurs", a raconté un journaliste. "C'est le bal des menteurs", a renchéri un autre.
Depuis lundi, Alexandre Ifi, directeur adjoint de la rédaction, ainsi que le journaliste Julien Arnaud ont annoncé leur départ.
"Je ne veux pas d'un journalisme lisse, comme Direct Matin. Et je ne veux pas faire des reportages sur Autolib" (filiale de Bolloré, NDLR), a lancé un journaliste.
Plusieurs personnalités étaient venus mercredi soutenir les grévistes, dont les journalistes Patrick Cohen et Bruce Toussaint, l'humoriste Stéphane Guillon et Benoît Hamon, candidat à la primaire de la gauche.
Envie d'afficher votre publicité ?
Contactez-nousEnvie d'afficher votre publicité ?
Contactez-nous
L'espace des commentaires est ouvert aux inscrits.
Connectez-vous ou créez un compte pour pouvoir commenter cet article.