Le président russe a délégué pour l'occasion son ministre de la Culture Vladimir Medinski après avoir annulé la semaine dernière sa visite prévue de longue date, alors que la poursuite par Moscou et son allié syrien de raids aériens intensifs sur les quartiers rebelles d'Alep a provoqué de vives tensions diplomatiques.
Vladimir Poutine a lancé dimanche une nouvelle pique contre la France, pas "très impliquée" selon lui dans le processus de résolution du conflit syrien et responsable d'avoir "envenimé" la situation.
Moscou a malgré tout maintenu l'inauguration du vaste complexe parisien, dessiné par l'architecte français Jean-Michel Wilmotte sur un terrain de plus de 4.000 mètres carrés au sol en plein coeur de la capitale française. Un chantier évalué à quelque 170 millions d'euros, entièrement financé par la Russie.
Signe du refroidissement entre les deux pays, aucun officiel français n'a encore été annoncé pour cet événement. Mais des discussions sont toujours en cours, selon une source russe.
Le patriarche de Moscou et de toute la Russie, Kirill, n'y sera pas. Selon son diocèse français, le primat devrait faire le déplacement le 4 décembre pour la consécration de la cathédrale de la Sainte-Trinité, le clou du complexe, avec ses cinq domes caractéristiques de l'architecture religieuse russe, visibles depuis les berges de la Seine.
Le plus grand des bulbes culmine à 37 mètres, une hauteur contrainte par les règles d'urbanisme. Après le veto mis, pour des raisons esthétiques, par l'ancien maire de Paris Bertrand Delanoë au projet architectural initial, Jean-Michel Wilmotte a aussi opté pour un or mat, plus discret.
Outre la cathédrale, l'édifice comprend un centre culturel (librairie, salles d'exposition et cafétéria), une maison paroissiale, les bureaux du service culturel de l'ambassade de Russie, ainsi qu'une école primaire bilingue franco-russe.
- Cadeau 'embarrassant' -
La paroisse parisienne du diocèse de Chersonèse - nom de la juridiction du patriarcat de Moscou sur la France - était à l'étroit dans son église du XVe arrondissement (dans le sud-ouest de Paris), un ancien garage, d'autant que sa communauté des fidèles a grossi au gré des différentes vagues d'immigration, russe mais aussi roumaine ou moldave.
Au besoin de place s'ajoute une démonstration de "soft power", analyse l'essayiste et prêtre orthodoxe Christophe Levalois.
"On peut lier ce projet à des besoins pastoraux, mais aussi au désir vraisemblable de la Russie de présenter une vitrine culturelle et cultuelle à Paris en dehors de son ambassade", souligne-t-il.
Cette nouvelle implantation ne fait pas que des heureux dans la communauté orthodoxe russe de France.
Certains fidèles liés à l'archevêché de la rue Daru à Paris, qui dépendent du patriarcat oecuménique de Constantinople, voient d'un mauvais oeil cette extension du territoire de l'Eglise de Moscou -- qui rassemble la moitié des 250 millions d'orthodoxes dans le monde --, jugée conservatrice, nationaliste et proche de Vladimir Poutine.
"Il existe en France une orthodoxie qui a fait le choix de la discrétion, de l'intégration, et qui ne devrait pas être tributaire de cette démonstration un peu tapageuse", estime le spécialiste français des religions Jean-François Colosimo.
Lors d'une visite en France à l'automne 2007, Alexis II, alors patriarche de l'Église orthodoxe russe (décédé en décembre 2008), avait souhaité la construction d'une nouvelle église orthodoxe à Paris. L'ancien président français Nicolas Sarkozy s'était dit prêt à soutenir ce projet, alors que l'heure était au rapprochement Paris-Moscou.
Mais la donne a changé depuis.
Pour Jean-François Colosimo, "ce projet d'hier, qui était en quelque sorte le cadeau du mariage, eh bien il devient en quelque sorte inutile, marginal, périphérique voire un peu embarrassant".
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