Vinci, Accenture, Radio France...le tableau de chasse de Mozaïk RH, fondé en 2007 sur le modèle associatif, n'a rien à envier aux autres cabinets traditionnels. Au total, 150 entreprises ont déjà fait appel à ses services pour leurs besoins en recrutement, et un partenariat vient d'être signé avec Pôle Emploi.
En près d'une décennie, son fondateur, Saïd Hammouche, n'a cessé de se démener pour promouvoir la diversité en entreprise. Aujourd'hui, cet homme de 44 ans qui en paraît bien dix de moins, rencontre régulièrement grands patrons et ministres pour les sensibiliser à la question.
"Les candidats ayant fait des cycles universitaires et résidant en banlieue ne sont pas ceux qui sont dans les radars des entreprises", explique d'une voix posée ce natif de Bondy, en Seine-Saint-Denis, au sourire communicatif.
"Toute la démarche de Mozaïk RH, c'est de déconstruire un certain nombre de préjugés, de stéréotypes" ancrés dans l'esprit de responsables de certains groupes, expose-t-il à l'AFP. Une tâche qui l'a aussi amené à co-écrire en 2012 un ouvrage intitulé "Chronique de la discrimination ordinaire".
- Maillon -
Le cabinet se charge de dénicher dans les quartiers défavorisés "de jeunes talents, qui ont fait des études, qui ont cru à la promesse de l'égalité, qui parlent plusieurs langues, qui sont aujourd'hui hyper souples" et de les présenter à des recruteurs qui ont des besoins. Pour remplir le rôle de "maillon manquant dans la chaîne".
Les discriminations, ce fils d'ouvrier marocain, qui n'a été naturalisé qu'à l'âge de 16 ans pour pouvoir participer aux championnats de France de judo, en a connu. Pourtant, il préfère ne pas s'étendre sur ses propres mésaventures, refusant de passer pour une victime.
Une attitude appréciée des dirigeants avec lesquels il traite.
"C'est quelqu'un de pragmatique, qui connaît extrêmement bien son sujet, et qui ne part pas avec des dogmes", déclare à l'AFP Christian Nibourel, président d'Accenture France et Benelux, qui salue son "charisme".
Au départ pourtant, rien ne prédestinait Saïd Hammouche à côtoyer les patrons de grands groupes.
Adolescent, il enchaîne une multitude de petits boulots, de vendeur sur les marchés à laveur de voitures en passant par employé de fast-food.
Sa ceinture noire de judo lui permet de décrocher son "premier boulot sympa", d'animateur en centre de loisirs. "Ca m'a passionné, j'ai voulu aller plus loin quand je suis arrivé à l'université", raconte-t-il.
Il passe alors un concours pour devenir directeur de centre de loisirs. Parallèlement, il décroche un BTS action commerciale, puis prolonge par des études à l'université de Créteil en gestion des ressources humaines.
Ces diplômes en poche, il travaille un an dans une mission locale, avant de trouver un emploi dans un établissement de formation continue pour adultes, ce qui lui permet d'intégrer l'Education nationale. Mais cinq ans plus tard, il abandonne son statut dans la fonction publique.
"J'étais un fonctionnaire parmi tant d'autres dans une organisation lente, lourde, incapable de gérer ses employés dans la durée", explique-t-il.
Une liberté retrouvée qui lui permet de se lancer, avec plusieurs amis avec lesquels il réfléchissait aux solutions à apporter contre le chômage dans les quartiers, dans l'aventure Mozaïk RH. "Au tout début, on n'imaginait pas qu'on allait monter un véritable cabinet de recrutement", se souvient-il.
Mais la démarche séduit au-delà des espérances. A tel point que l'ONG Ashoka, qui soutient les entrepreneurs sociaux à travers le monde, octroie à Saïd Hammouche une bourse de 150.000 euros sur trois ans et l'aide à structurer son projet.
Aujourd'hui, le cabinet emploie 32 salariés et commence à essaimer dans l'Hexagone. Quatre agences Mozaïk RH ont déjà ouvert à Lille, Lyon, Nantes et Toulouse.
Un changement d'échelle qui nécessite beaucoup d'argent, au moins un million d'euros.
Pour ouvrir d'autres antennes, Saïd Hammouche a créé en 2015 une fondation, et enchaîne maintenant les dîners de levées de fonds.
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