Omniprésent dans le débat politique et économique, le vote pour le Brexit a fait une arrivée remarquée dans les assiettes. Ou plutôt sur les tartines: car la chute de la livre, nourrie par les craintes d'un "Brexit dur", a eu un effet inattendu, avec la disparition jeudi de la fameuse Marmite du site internet du géant des supermarchés Tesco.
Au coeur du problème: si la Marmite, une pâte noire au goût amer et salé fabriquée à partir de levure de bière, est Made in Britain, elle est détenue par le géant néerlandais de l'agroalimentaire Unilever.
Or, les revenus tirés de la Marmite au Royaume-Uni sont mécaniquement diminués lorsqu'il les convertit en euros, à cause de la dépréciation de la livre ces derniers mois.
Pour compenser, le groupe néerlandais a décidé, selon la presse, d'augmenter de 10% le prix des Marmite facturées à Tesco, ce que dernier a refusé, préférant arrêter de lui en acheter - au risque de ne plus pouvoir les proposer à ses clients.
En fin de journée, Unilever a annoncé que le problème d'approvisionnement de Tesco au Royaume-Uni et en Irlande -car l'histoire avait franchi la mer- avait été "résolu avec succès". Sans donner le détail de l'accord avec Tesco.
La crainte d'une pénurie de ce produit iconique au Royaume-Uni, qui se déguste à tout moment de la journée sur des toasts ou comme base pour des sandwichs, sauces ou bouillons, a fait réagir jusque dans les rangs politiques.
- Guerre des prix -
Le député conservateur Gerald Howarth a estimé dans le Daily Telegraph qu'Unilever utilise "la baisse de la livre pour exploiter le consommateur". Pour le leader du Parti libéral-démocrate Tim Farron, "le chaos autour du Brexit touche désormais nos rayons de supermarché".
Le plongeon de la livre commence en effet à déstabiliser l'économie du pays, la devise ayant atteint récemment un plus bas en 31 ans face au dollar et en 7 ans face à l'euro.
"Le Brexit est le facteur déclenchant" et "il est probable que d'autres sociétés (...) comme Nestlé et Ferrero vont suivre le mouvement", a expliqué Pinar Hosafci, analyste pour le cabinet Euromonitor International.
"La bataille Tesco-Unilever est un symptôme d'une guerre des prix féroce", notait pour sa part Neil Wilson, analyste pour ETX Capital.
Tesco évolue dans un secteur extrêmement concurrentiel au Royaume-Uni, où les chaînes traditionnelles de supermarchés doivent composer avec la montée en puissance des enseignes allemandes de maxi-discompte Aldi et Lidl.
De son côté, la British Retail Consortium, la fédération professionnelle de la grande distribution, a lancé un appel au gouvernement cette semaine, en soulignant que le secteur était le plus grand importateur du Royaume-Uni et que la pression sur les coûts, liée à la baisse de la livre, "pourrait signifier des prix plus élevés dans les magasins".
De même, la fédération des stations-service a prévenu que le prix de l'essence à la pompe risquait d'augmenter d'ici à la fin du mois de 4 à 5 pence par litre (autour de 5 centimes d'euro).
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