"Ce qui nous a le plus surpris, c'est que dans un climat que nous percevons comme déprimé, les jeunes évoquent l'histoire de France avec fierté pour la plupart, et la voient comme un progrès", déclare à l'AFP Françoise Lantheaume, professeur à l'université de Lyon 2, à l'initiative de ce projet.
"Raconte l'histoire de France telle que tu la connais", "Cite un mot ou une phrase qui selon toi la résume", "Comment sais-tu tout ça?": trois questions auxquelles ont répondu par écrit près de 6.000 enfants de tous milieux sociaux, en début de collège, lycée ou juste après le bac, en France métropolitaine, en Corse et à la Réunion.
Une enquête au long cours dont les réponses ont été analysées et rapportées dans un ouvrage collectif, "Le Récit du commun: l'histoire nationale racontée par les élèves", qui vient de sortir aux Presses universitaires de Lyon.
Il ne s'agissait pas d'évaluer la qualité des connaissances, mais de s'interroger sur l'existence d'un récit commun chez les élèves. Et sur les sources de leurs savoirs.
S'il existe quelques différences selon les régions (un tiers des élèves de la Réunion citent l'esclavage, les petits Vendéens rappellent les massacres après la Révolution de 1789), les chercheurs ont constaté "une homogénéité étonnante", selon Mme Lantheaume.
Qui s'explique certes par un programme scolaire national mais aussi par "une ligne de force identique" transmise par les autres sources de connaissances citées par les enfants: les commémorations (pour les plus jeunes) et la famille. Internet, selon leurs déclarations, ne joue pas un grand rôle dans ce champ de savoirs.
- "Tous les Louis" -
La fierté liée au passé de leur pays et l'idée de progrès sont les deux axes majeurs se détachant des écrits des enfants et adolescents.
Pour eux, l'histoire de France est "une succession de bascules", marquée par des épreuves (les guerres principalement) mais portée par le progrès. "Et l'aboutissement de ce progrès de plusieurs siècles, c'est maintenant. Le pays dans lequel ils vivent. Avec de la démocratie, des libertés, de nouveaux droits, même si c'est loin d'être parfait", rapporte la chercheuse.
La Gaule marque pour la plupart le début de l'histoire du pays (certains la font démarrer au Big Bang...). D'autres, moins nombreux, commencent à la Révolution, voire à la Première Guerre mondiale. Des conflits qu'ils évoquent à travers les souffrances des soldats et des civils, peu à travers les grandes batailles.
Quant à la phrase qui revient le plus souvent pour résumer l'histoire de France, c'est "Liberté, égalité, fraternité".
Beaucoup s'impliquent dans leur récit et utilisent les termes "nous" ou font référence à des membres de leur famille ("mon grand-père"), signe d'"un rapport très fort à l'histoire", selon l'universitaire.
Au panthéon des personnages les plus cités figurent, dans l'ordre, Louis XIV (1.320 occurrences), Napoléon, Charlemagne, Louis XVI, Clovis, De Gaulle, Hitler et... Nicolas Sarkozy. L'enquête s'est déroulée fin 2011 début 2012, pendant la campagne présidentielle, "et les enfants vivent dans le présent", note la chercheuse.
Au-delà de ces figures reviennent souvent "les paysans" et "les aristocrates". Mais les groupes les plus fréquents sont "le peuple", "les Français", "les rois" ("tous les Louis", écrit un élève), "les femmes" et "les Allemands".
Loin d'une histoire marquée par la culpabilisation, comme l'affirment certains responsables politiques, la France est souvent présentée comme victime, notamment au XXe siècle.
A l'expression de "roman national", Françoise Lantheaume préfère celui de "mythistoire partagée". A leur âge, les jeunes interrogés "veulent comprendre le monde, se l'approprier et en faire partie. Pas le déconstruire", conclut l'universitaire.
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