L'offensive éclair déclenchée lundi par les talibans, qui a fait au moins 15 morts dont dix policiers, n'est que le dernier épisode en date d'un interminable feuilleton dans cette province - la plus vaste de l'Afghanistan - où la situation est toujours volatile et où les insurgés ont su ces dernières années résister aux troupes britanniques, puis américaines.
L'armée afghane a déployé "plus de 300 membres des forces spéciales et des dizaines d'artilleurs" pour venir à bout des insurgés, a dit à l'AFP le commandant des opérations dans le Helmand, Abdul Jabar Qahraman. Cet ancien colonel a été nommé personnellement par le président Ashraf Ghani pour reprendre le contrôle de cette province méridionale.
Apparemment, le gouvernement, qui vient à peine de dégager le centre de Kunduz, la capitale commerciale du nord-est assiégée depuis une semaine par les talibans, redirige ses forces vers le Helmand : un porte-parole des autorités de cette province, Omar Zwak, a expliqué à l'AFP que ces renforts avaient été "envoyés de Kaboul et des provinces voisines pour entamer une opération de nettoyage" dans Lashkar Gah.
Les responsables américains de l'opération de l'Otan Resolute Support ont confirmé mardi à l'AFP avoir procédé à "deux frappes aériennes sur le Helmand" la veille et disposer sur place de "moyens pour continuer d'appuyer (les forces afghanes) si nécessaire".
Ville moyenne de 200.000 habitants en bordure de la rivière qui porte le même nom d'Helmand, Lashkar Gah est régulièrement la cible des talibans qui espèrent y planter symboliquement leur drapeau : au cours de la précédente offensive d'envergure en août, des milliers de civils avaient fui pour chercher refuge jusque dans Kaboul, abandonnant leurs champs et leurs maisons.
- Un fief imprenable -
Le général John Nicholson, le patron de Resolute Support, s'est rendu sur place samedi pour "réaffirmer le soutien" de l'Alliance atlantique aux autorités de Lashkar Gah. Moins de 48 heures plus tard, les insurgés déclenchaient pourtant une nouvelle opération dans laquelle sept d'entre eux ont trouvé la mort, selon le ministère de l'Intérieur.
Le Helmand, dans lequel est produit 80% environ de l'opium mondial, est une place-forte des talibans qui y contrôlent les champs de pavot. Son intérêt stratégique tient de plus à sa frontière commune avec la province pakistanaise du Baloutchistan, dont la population est elle aussi très majoritairement pachtoune, ce qui facilite la circulation des combattants.
Le gouvernement central n'a jamais pu asseoir son autorité sur la totalité de cette province, mais les armées occidentales s'y sont également cassé les dents : les 1.600 soldats britanniques déployés en 2006 dans le Helmand avaient comparé les combats, de par leur intensité, à ceux de la guerre de Corée au début des années cinquante. En 2009, jusqu'à 4.000 marines américains y étaient à leur tour présents.
Depuis le retrait fin 2014 des forces étrangères, dont moins de 10.000 hommes, principalement des Américains, sont restés sur place, l'armée afghane est en première ligne avec la police. Or, de l'aveu d'un conseiller occidental à Kaboul, "l'armée afghane peine à recruter dans le Helmand. Du coup, les unités envoyées sur place n'ont aucune connaissance du terrain".
Cette offensive dans le sud est intervenue au moment où les troupes afghanes reprenaient enfin le contrôle de Kunduz, la capitale du nord proche du Tadjikistan, après une semaine de combats, avec le soutien des forces spéciales et des Américains, contre les talibans.
Si ces deux foyers viennent d'être maîtrisés - pour un temps du moins -, des affrontements se poursuivent depuis quelques jours dans la province occidentale de Farah : selon le correspondant de l'AFP sur place, les talibans sont parvenus aux portes de la petite capitale éponyme, sans encore y pénétrer.
Pour les observateurs, ce regain d'activité relève de la "démonstration de force" après que les Occidentaux viennent de renouveler leur soutien financier au gouvernement afghan à la conférence des donateurs de Bruxelles.
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