L'accord a été signé lors d'une cérémonie en présence de M. Poutine et de son homologue turc Recep Tayyip Erdogan.
Ce projet, baptisé TurkStream et d'un coût estimé à plus de dix milliards de dollars, permettra à la Russie d'acheminer du gaz vers la Turquie et l'Europe sous la Mer noire. Il avait initialement été dévoilé fin 2014 en même temps que l'abandon, en pleine crise ukrainienne, du projet South Stream par la mer Noire, bloqué par l'Union européenne.
L'accord signé lundi "prévoit la construction de deux lignes de gazoduc sous la Mer Noire", a indiqué à la presse le PDG de la compagnie russe Gazprom Alexei Miller. "La capacité de chacune de ces lignes est de 15,75 milliards de mètres cubes de gaz par an".
La signature de l'accord de réalisation par les ministres de l'Energie de chaque pays est survenue quelques heures après le début du 23e Congrès mondial de l'Energie organisé à Istanbul, et à l'occasion duquel M. Poutine faisait sa première visite en Turquie depuis la réconciliation des deux pays après une grave crise diplomatique née de la destruction par l'aviation turque d'un bombardier russe survolant la frontière syro-turque en novembre 2015.
"Les études montrent que le tracé turc est le plus rentable et le plus économique pour transférer" le gaz, s'était félicité plus tôt M. Erdogan.
Dans un signe d'apaisement des relations, M. Poutine a même assuré que la Russie réduirait les prix du gaz qu'elle vend actuellement à la Turquie.
En représailles à la destruction de son bombardier, la Russie avait imposé une série de sanctions économiques contre la Turquie, dont l'interdiction de vols charters vers le pays. Cette mesure s'était traduite par un effondrement de 83% du nombre des touristes russes en Turquie en un an, selon des chiffres officiels turcs.
Déterminées à tourner la page, la Russie et la Turquie souhaitent désormais renforcer leurs échanges économiques pour les porter à 100 milliards de dollars par an.
- 'Processus de guérison' -
M. Poutine a annoncé l'ouverture du marché russe "pour tout un nombre de produits turcs" dont "des produits agricoles", levant ainsi une sanction prise au début de la crise.
Pour Andrew Neff, analyste chez IHS Energ, "le processus de guérison a commencé" entre les deux pays, "chacun laissant derrière lui le souvenir aigre des dix derniers mois écoulés" . Toutefois, les analystes restent sceptiques quant à la rentabilité de TurkStream et sa réalisation, la construction du gazoduc n'ayant toujours pas commencé.
La Turquie adresse aussi à l'Occident, à travers ce rapprochement, un message montrant qu'elle peut encore "suivre sa propre voie", a estimé M. Neff, alors que M. Erdogan a exprimé à de multiples reprises le sentiment qu'il avait été peu soutenu par ses partenaires européens et américains après le putsch avorté de la mi-juillet.
Les deux dirigeants se sont également engagés à accélérer le chantier de la première centrale nucléaire turque à Akkuyu (sud du pays), dont la construction a été confiée aux Russes.
Cette centrale, au coût estimé à près de 18 milliards d'euros, est voulue par M. Erdogan, qui déplore que le "pays dépende des pays étrangers pour ses apports en énergie". Avec cette centrale, "l'objectif est que 10% de la production électricité provienne de" source nucléaire, a-t-il précisé.
En dépit de leur récent rapprochement, Moscou et Ankara sont toujours fermement opposés sur le dossier syrien: le premier est un allié clef du régime du président Bachar al-Assad, alors que le second appuie la rébellion qui veut le chasser du pouvoir.
"La Russie et la Turquie sont toutes deux en faveur d'une fin rapide de cette effusion de sang en Syrie", s'est contenté de noter M. Poutine.
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