Au final, le non l'a emporté de justesse dimanche à 50,21%, ruinant les efforts de presque quatre ans de pourparlers et reflétant un pays profondément divisé après plus d'un demi-siècle de conflit armé.
"La logique était de voter non, moi j'ai voté non... parce que ce serait très difficile que la Colombie soit dirigée par la guérilla" marxiste des Forces armées révolutionnaires de Colombie (Farc), confie Mateo Alvarez, marchand de rue travaillant à Medellin.
La deuxième ville du pays est le bastion de l'ex-président Alvaro Uribe, le plus farouche opposant à l'accord de paix. Ses habitants ont voté à 62,97% contre ce texte de 297 pages, négocié à Cuba.
"Nous avons voté pour le non... On pense tous que ces agréments conclus là-bas devraient être bien discutés avec le peuple colombien, parce que ça n'aurait pas dû être fait en accéléré comme ils l'ont fait à La Havane", ajoute John James Garcia, vendeur ambulant de 34 ans.
"On pense aussi que la justice doit être rendue (...) celui qui a fait quelque chose doit payer d'une manière ou d'une autre. Il ne faut pas donner autant de facilités à ces gens-là au travers d'un accord vu ce qu'ils ont fait au pays...", ajoute-t-il d'un ton amer.
- 'Tant de meurtres' -
Déchirée par la violence du cartel de la drogue de Pablo Escobar à la fin des années 1980 et au début des années 1990, Medellin a souffert en outre des activités de la guérilla dans les quartiers les plus pauvres.
Le traitement judiciaire réservé aux guérilleros, qui selon l'accord pouvaient bénéficier de peines alternatives à la prison s'ils avouaient leurs crimes, a été l'un des points les plus contestés du texte.
"Si vous volez un portable, vous allez en prison", mais "des gens ayant commis tant de meurtres, fait tant de choses, on les laisse tranquilles !", soupire José Nicolas Murillo, autre vendeur ambulant, installé à Medellin après avoir été déplacé par la violence dans sa région.
A 400 kilomètres de là, à Toribio, bourg enclavé dans les montagnes du Cauca, à proximité de Cali (sud-ouest), la tendance est inversée : 84,80% des électeurs ont plébiscité l'accord de paix.
"Il y avait de grandes attentes pour le oui. Je me suis dit : +Si nous votons tous oui, nous allons changer ce pays+", raconte l'un d'eux, Luis Gregorio Rivera, qui travaille dans l'agriculture et la construction.
"Le processus de paix me paraissait quelque chose de très bien, de novateur, qui n'avait jamais été fait dans le pays. Mais maintenant que le non a gagné au référendum, on est très préoccupés", dit-il.
- 'Un avenir meilleur' -
Toribio et ses 26.000 habitants ont toujours vécu sous la pression d'une forte présence des Farc qui, une fois l'accord ratifié, devaient lâcher leurs armes puis se transformer en mouvement politique légal.
"Nous avons souffert de la guerre dans notre propre chair", assure Luis Gregorio, qui se souvient de l'époque, récente, où il était dangereux de sortir dans les rues.
"Je fais partie de ceux qui ont voté oui, parce que je ne veux plus la guerre, je ne veux plus de morts, je ne veux plus de déplacés", souligne Jimmy Bermudez, qui a perdu la jambe gauche en sautant sur une mine antipersonnel il y a 11 ans.
La victoire du non dimanche a fait aux habitants de Toribio l'effet d'une douche froide, eux qui se réjouissaient d'avoir vu la violence disparaître depuis la trêve des Farc en juillet 2015, renforcée par le cessez-le-feu bilatéral entré en vigueur le 29 août.
"J'espérais un avenir meilleur pour moi et pour les autres personnes affectées par le conflit", se désole Jimmy.
Malgré la forte polarisation du pays, partisans du oui comme du non gardent l'espoir d'une prochaine reprise des négociations de paix.
Dans "un pays habitué à la guerre (...) l'espoir est que (...) le dialogue se poursuive", veut croire Luis Gregorio.
Envie d'afficher votre publicité ?
Contactez-nousEnvie d'afficher votre publicité ?
Contactez-nous
L'espace des commentaires est ouvert aux inscrits.
Connectez-vous ou créez un compte pour pouvoir commenter cet article.