"Avec le référendum, nous sommes face à une décision historique et nous espérons que tous les Colombiens vont aller voter", a déclaré le président Juan Manuel Santos, en installant samedi la Mission d'observation électorale, composée de près de 200 personnes de 25 pays.
L'accord avec les Farc vise à mettre fin à la plus ancienne confrontation armée des Amériques qui, au fil des décennies, a impliqué diverses guérillas d'extrême gauche, des milices paramilitaires d'extrême droite et les forces de l'ordre, faisant plus de 260.000 morts, 45.000 disparus et 6,9 millions de déplacés.
Le référendum, non obligatoire, a été voulu par M. Santos afin de donner la "plus large légitimité" possible à l'accord qu'il a signé le 26 septembre avec le chef des Forces armées révolutionnaires de Colombie (Farc, marxistes), Rodrigo Londoño, plus connu sous ses noms de guerre Timoleon Jiménez ou Timochenko.
Près de 34,9 millions d'électeurs sont appelés à répondre par "Oui" ou par "Non" à la question: "Soutenez-vous l'accord final d'achèvement du conflit et de construction d'une paix stable et durable?", titre du document de 297 pages issu de près de quatre années de pourparlers délocalisés à Cuba et conclus le 24 août.
- 620 kg d'explosifs détruits -
"Le seing de légitimité et d'approbation du peuple colombien est nécessaire pour que la paix soit stable et durable", a réaffirmé le chef de l'Etat devant les observateurs, dont d'anciens présidents d'Amérique latine, ainsi que les prix Nobel de la paix guatémaltèque Rigoberta Menchu et argentin Adolfo Perez Esquivel.
Au total 240.000 policiers et militaires ont été déployés pour assurer la sécurité du scrutin, dans près de 82.000 bureaux de vote ouverts de 8h00 (13h00 GMT) à 16h (21h00 GMT). Des Colombiens vivant à l'étranger se sont déjà rendus aux urnes, notamment en Asie, selon le ministère des Affaires étrangères.
Si la paix est votée, les Farc, nées en 1964 d'une insurrection paysanne et qui comptent encore 5.765 combattants, se convertiront en parti politique après avoir déposé les armes sous supervision d'une mission de l'ONU, qui a déjà vérifié la destruction samedi de 620 kg d'explosifs par la guérilla.
Pour l'emporter, le "Oui" doit recueillir au moins 4,4 millions de voix (13% de l'électorat) et le "Non" un score plus faible. Les derniers sondages, réalisés avant la signature de l'accord, donnent un large avantage au "Oui". Selon l'institut Datexco, 55% des personnes interrogées se disent prêtent à voter pour et 36,6% contre. Une autre enquête, de l'institut Ipsos Napoleon Franco, donne 66% au "Oui" et 34% au "Non".
- Une consultation superflue? -
"Le référendum n'était pas nécessaire. La seconde élection de Santos était déjà un plébiscite pour la paix" en 2014, a déclaré à l'AFP Ariel Avila. Mais selon cet analyste de la fondation Paix et Réconciliation, le chef de l'Etat centriste y a aussi recours pour "donner la dernière estocade à l'uribisme", courant de l'ex-président de droite et actuel sénateur Alvaro Uribe (2002-2010).
Le patron du Centre démocratique mène une féroce campagne pour le "Non". Il est allé jusqu'à intégrer une chaîne humaine contre l'accord de paix, le jour même de sa signature à Carthagène des Indes (nord), alors parée du symbole d'une colombe tenant un rameau d'olivier et un ruban aux couleurs jaune, bleu, rouge du drapeau colombien.
Les opposants dénoncent un "laxisme" des sanctions prévues contre les auteurs des crimes les plus graves, qui seront jugés par un tribunal spécial et pourront bénéficier de peines alternatives à la prison s'ils disent la vérité. Ils rejettent aussi la participation des guérilleros démobilisés à la vie politique et craignent que le pays bascule vers un "castro-chavisme" inspiré des régimes cubain et vénézuélien.
"La Colombie joue le tout pour le tout avec ce référendum, sur le plan social, économique et politique", a déclaré à l'AFP Jorge Restrepo, directeur du Centre de ressources pour l'analyse des conflits (Cerac).
Malgré tout, le gouvernement comme les Farc ont écarté toute éventualité de renégociation. Lors d'un entretien à l'AFP, M. Santos a averti que si le "Non" l'emporte, les guérilleros "retournent dans la jungle".
La campagne pour le "Oui" a donné lieu à de multiples initiatives et rassemblements, le chef des négociateurs avec les Farc, Humberto de La Calle, sillonnant même le pays pour expliquer l'accord visant à "ne plus nous entretuer pour des idées".
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