Une immense foule de milliers d'Américains s'était réunie samedi matin sur le National Mall et écoutait religieusement le premier président noir des Etats-Unis, venu couper le ruban du Musée national de l'histoire et de la culture afro-américaine.
Barack Obama s'est alors tourné sur sa gauche pour passer en revue la famille de Ruth Odom Bonner, une vieille femme de 99 ans aux cheveux blancs et au manteau rose carmin lui tombant sur les pieds.
Fille d'un Noir né esclave dans le Mississippi avant d'obtenir la liberté et de vivre sous la ségrégation, elle a tiré sur le cordon pour faire sonner la cloche de l'ouverture, avec l'aide de son fils, son petit-fils, son arrière petite-fille ainsi que Barack et Michelle Obama.
"C'était symbolique de l'esclavage et de la servitude que notre peuple a enduré de si longues années", se reprend Heather Lawson, la trentaine, tandis qu'une larme perlait sur sa joue, faisant couler son eye-liner bleu. "Cela signifie beaucoup pour moi."
Pour la jeune femme, vêtue d'une robe aux imprimés africains, il était "important d'être là aujourd'hui", pour "prendre part à l'histoire".
"Nous venons de loin et nous avons encore beaucoup de chemin à faire", confie-t-elle à l'AFP, expliquant que les tensions raciales ne vont pas disparaître du jour au lendemain.
"Le fait que nous étions à une époque pieds nus, enchaînés, réduits en esclavage et vendus, et que maintenant nous sommes là, cela montre que nous pouvons y arriver. Nous pouvons réaliser les changements qui s'imposent".
- Lynchage -
Comme elle, de nombreux Noirs venus des quatre coins des Etats-Unis samedi oscillaient entre fierté et sentiment que le combat pour l'égalité est loin d'être terminé, en arrivant devant l'imposant édifice couvert de bronze, à deux pas de la Maison Blanche et posé sur l'artère menant au Capitole.
Surtout, l'émotion suscitée par Ruth Odom Bonner chez de nombreuses personnes samedi reflète la sensibilité de la question raciale pour les Noirs aux Etats-Unis.
"Je suis honorée et pensive", a résumé Jeanette Providence, professeure de collège venue spécialement de Sacramento (Californie), sur l'autre côte américaine.
"Dans nos livres d'histoire, notre contribution n'est pas reconnue", a déploré cette sexagénaire. "Donc je suis venue rendre hommage à ceux de nos ancêtres qui ont rendu cela possible."
Quant aux brutalités policières qui secouent de nouveau l'Amérique, "elles rappellent la période où l'on lynchait" les Noirs, avance-t-elle.
Même son de cloche chez Karmello Colman, venue elle de Kansas City, dans le Missouri, qui se dit à la fois "fière" et "humble". Fière de l'édifice qui rassemble les "accomplissements" des Noirs, et attentive aux "importantes questions" qui restent à régler: tensions raciales, relations de la jeunesse noire avec la police, inégalités...
Tout ceci est évoqué dans les expositions du musée, qui raconte l'histoire afro-américaine, de l'esclavage à Barack Obama.
Tout le monde ne pouvait y accéder samedi, pour éviter une trop grande affluence. Heather Lawson, elle, a déjà son billet pour mardi.
"Je sais déjà que je vais pleurer dedans", sourit-elle. "Et pas qu'une fois!"
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