La candidate démocrate à la présidentielle avait demandé un peu plus tôt qu'une vidéo des faits, tournée par les forces de l'ordre, soit rendue publique. Les autorités de Charlotte s'y refusent, malgré la pression populaire et la tension qui ne retombe pas dans les rues.
De fait, la controverse a rebondi vendredi quand la télévision NBC a diffusé une autre vidéo, dramatique, qui montre de façon imparfaite le moment du décès mardi de Keith Lamont Scott, 43 ans.
D'après la police, Keith Scott a été mortellement blessé par balle alors qu'il refusait de lâcher son arme de poing. Ses proches affirment au contraire qu'il n'avait qu'un livre en main et qu'il attendait pacifiquement son fils à un arrêt d'autobus.
La vidéo révélée par NBC a été réalisée par la femme de la victime, Rakeyia Scott. Tournant ces images avec son smartphone, elle approche de la zone où son mari est tenu en joue par plusieurs policiers portant un gilet pare-balles.
"Ne tirez pas! Ne tirez pas! Il n'est pas armé! Il n'a rien fait!", implore l'épouse, qui se trouve à une dizaine de mètres de la scène.
"Lâche ton arme! Lâche ton arme!", ordonne la voix d'un policier, sans que l'on puisse voir où Keith Scott se trouve exactement.
- 'Vous lui avez tiré dessus?' -
"Il n'a pas d'arme! Il a un problème cérébral. Il ne va rien vous faire, il vient de prendre ses médicaments!", prévient Rakeyia Scott.
La femme crie ensuite à son mari la chose suivante: "Keith, ne les laisse pas casser la vitre, sors de la voiture! Keith, ne fais pas ça! Keith! Sors de la voiture! Ne fais pas ça! Keith!"
Plusieurs détonations retentissent alors et l'épouse se met à pousser des cris alarmés: "Vous lui avez tiré dessus? Vous lui avez tiré dessus? Vaudrait mieux pour vous qu'il ne soit pas mort!"
Rakeyia Scott continue à filmer, son mari étant étendu à plat ventre sur la chaussée, entouré par quatre policiers.
"Voici les policiers qui ont tiré sur mon mari et il y a intérêt à ce qu'il vive, car il ne leur avait rien fait", dit-elle enfin.
La vidéo ne montre aucune arme visible près du corps de Keith Scott. NBC a toutefois indiqué avoir reçu une photo d'un témoin semblant montrer une arme près des pieds de la victime.
- Un débat national -
A Charlotte, la mort de Keith Scott a déclenché un mouvement de protestations tendues, qui ont conduit le gouverneur a décréter l'état d'urgence et à appeler en renfort les militaires de la Garde nationale. Un couvre-feu a également été instauré pour la nuit de vendredi à samedi, comme la veille.
Le couvre-feu n'entre en vigueur qu'à minuit et quelques rassemblements pacifiques étaient en cours en début de soirée.
Plus largement, ce décès brutal a relancé un débat national sur les abus des forces de l'ordre à l'encontre des Afro-Américains.
Keith Scott a perdu la vie quatre jours seulement après qu'un Noir non armé a été abattu par une policière blanche à Tulsa, dans l'Oklahoma (sud), sous l'oeil des caméras de police.
Au contraire de Charlotte, les autorités de Tulsa ont rapidement rendu publiques les vidéos du drame, permettant une avancée rapide de l'enquête. La policière auteure du tir mortel a été inculpée jeudi d'homicide involontaire. Elle a été libérée vendredi après avoir versé une caution de 50.000 dollars.
De façon plus générale, les tensions à Charlotte témoignent de la persistance du problème des préjugés raciaux dans une partie des forces de l'ordre américaine. Elles illustrent aussi le fossé de défiance qui continue à séparer les policiers et les communautés noires dans certaines villes du pays.
Barack Obama, premier président noir de l'histoire des Etats-Unis, s'est exprimé brièvement vendredi sur ces événements, alors qu'il s'apprête à inaugurer samedi à Washington un musée dédié à l'histoire afro-américaine: l'ouverture de cet établissement va permette aux Américains de "replacer certains événements dans un contexte historique", a-t-il espéré.
Les gens qui voient ce qui se passe à Charlotte et qui visiteront ce musée comprendront mieux les revendications des Noirs, ce qui leur permettra de prendre su recul et "de dire: +je comprends, je compatis+".
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