"Il y a un foisonnement d'idées" pour accélérer le traitement de ces plaies longues à cicatriser, douloureuses pour les patients et coûteuses pour les systèmes de santé, déclare à l'AFP Luc Téot, président de la société française des plaies et cicatrisations et chirurgien au CHRU de Montpellier.
Mais dans le lot, "il y a aussi des paillettes et de la poudre aux yeux. Cela tient un peu du Far West", car ce marché est "très ouvert", estime-t-il.
Le marché mondial du traitement des plaies devrait représenter 20,4 milliards de dollars en 2021, contre 17 milliards de dollars en 2016, soit un taux de croissance annuel moyen de 3,6%, selon une étude du cabinet MarketsandMarkets.
Le segment du traitement avancé des plaies, qui porte notamment sur les plaies chroniques, devrait connaître la plus forte croissance du marché sur cette période, selon cette étude.
Avec la miniaturisation croissante de l'électronique fleurissent des projets de capteurs connectés pour suivre l'évolution de la cicatrisation en mesurant différents paramètres, voire pour déclencher une réponse thérapeutique du pansement, qui devient en quelque sorte autonome.
Aux Etats-Unis, des chercheurs du MIT développent par exemple un hydrogel particulièrement souple et biocompatible, avec des capteurs et des doses de médicaments embarqués.
En Grande-Bretagne, des chercheurs de l'université de Bath (sud-ouest) ont inventé un pansement devenant fluorescent dès qu'il détecte une infection bactérienne.
"Notre pansement devrait permettre à la fois de dépister très rapidement une infection, et d'éviter la prescription d'antibiotiques pour des plaies non infectées", comme c'est le cas généralement en cas de suspicion d'infection, explique à l'AFP le professeur Toby Jenkins, responsable du projet.
Cette innovation va être testée dans un premier essai clinique de non-toxicité, en partenariat avec une entreprise allemande de dispositifs médicaux, Paul Hartmann, précise M. Jenkins.
Le groupe français Urgo n'est pas en reste: il travaille notamment sur un projet de capteur de compression pour les ulcères de jambes, et sur un projet européen de photothérapie, visant à suivre l'évolution de plaies chroniques et stimuler leur cicatrisation avec des diodes électroluminescentes (LED).
- Obstacle des prix -
S'ils observent avec attention et parfois soutiennent financièrement ces innovations, les poids lourds des pansements sont prudents quant à leurs perspectives commerciales dans un futur proche.
"On entend beaucoup parler de nouvelles technologies, mais je pense qu'elles ne seront pas utilisées dans le traitement des plaies avant que leur prix devienne vraiment compétitif. Les systèmes de remboursement trancheront", estime Pernille Singer, vice-présidente en charge de la recherche et du développement dans le traitement des plaies chez le groupe danois Coloplast.
D'autant que des solutions actuelles pour traiter les plaies chroniques, comme les pansements avec interface humide ou les thérapies par pression négative, sont encore aujourd'hui insuffisamment connues du personnel soignant: "Il y a une grande marge de progression du savoir-faire basique pour traiter les plaies", selon Mme Singer.
"Développer un pansement connecté, c'est assez facile. Prouver qu'il a vraiment une efficacité clinique, c'est là que ça devient vraiment compliqué", renchérit Sandrine Letellier, responsable marketing pour l'activité de traitement des plaies chez Smith and Nephew, géant britannique des dispositifs médicaux.
Pour déterminer tous les paramètres à prendre en compte pour un algorithme de décision performant dans le traitement des plaies sévères, "il faudrait recueillir des milliers de données" dans le cadre d'études cliniques de grande ampleur, souligne Mme Letellier.
"Est-ce que sera faisable demain? Non, mais après-demain, certainement", résume-t-elle.
"D'ici cinq à dix ans" les pansements intelligents et autonomes se généraliseront, et la hausse des volumes fera baisser leurs prix, prédit Luc Téot, selon lequel "les besoins sont déjà là".
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