Plus de 200 personnes se sont réunies devant le mémorial installé sur le site de l'ex-usine AZF, entièrement détruite lors de la plus grande catastrophe industrielle qu'a connue la France depuis 1945.
A 10H17, heure de l'explosion, les sirènes ont retenti puis les noms des 31 personnes décédées ont été égrenés avant une minute de silence.
Plusieurs gerbes ont été déposées au pied du monument, de la part d'élus et d'associations de victimes mais de certaines seulement car, comme chaque année, les hommages ont eu lieu en ordre dispersé, montrant les divergences récurrentes sur l'explication du sinistre, entretenues par un suspense judiciaire persistant.
"C'était il y a 15 ans mais la justice ne s'est toujours pas prononcée", a constaté auprès de l'AFP le maire de Toulouse, Jean-Luc Moudenc (LR), en référence à la tenue d'un troisième procès, fin janvier, après la cassation des condamnations.
"On ne sait toujours pas ce qui s'est passé, 15 ans après", résume ainsi Jacques Mignard, le président de "Mémoire et solidarité", l'association des salariés d'AZF qui tenait sa propre cérémonie à une trentaine de mètres du mémorial officiel.
"Nous n'avons jamais renoncé à l'exigence de vérité", avertit M. Mignard, qui estime que la faute n'incombe pas à Total ni à sa filiale Grande-Paroisse, propriétaire d'AZF. Cette association rejette la thèse retenue par la justice selon laquelle le mélange malencontreux de produits chimiques a provoqué la déflagration.
A environ deux kilomètres de là, un troisième rassemblement a regroupé quelques dizaines de personnes, à l'appel d'une autre association, dite "des sinistrés du 21-septembre", qui, elle, réclame la condamnation de l'industriel.
- 'Un procès sans victimes' -
Même l'attitude à tenir face au nouveau procès, à Paris et non à Toulouse, n'a pas provoqué l'union sacrée entre les associations de victimes.
"Ca pourrait être à Tombouctou ou ailleurs, ça ne change rien", estime Jacques Mignard, président de Mémoire et solidarité.
"A Paris, la quasi-totalité des victimes ne pourra pas y aller. C'est le rêve de toute dictature: réussir à faire un procès sans victime", enrage en revanche le président des "sinistrés du 21-septembre", Jean-François Grelier.
"Je ne pourrai pas y aller car j'ai du mal à tenir debout. Il y a beaucoup d'injustice là-dedans", dénonce Anne-Marie Capgras, 70 ans, membre de cette association. "A Paris, il n'y aura pas les gens avec les séquelles", explique-t-elle des larmes pleins les yeux.
L'association avait installé une banderole au rond-point "du 21-septembre": "nouveau procès AZF à Paris: les victimes TOTALement bâillonnées".
Le 21 septembre 2001, 300 tonnes d'ammonitrates stockées dans un hangar en plein Toulouse explosent. La déflagration, qui souffle le complexe chimique AZF, est entendue jusqu'à 80 km à la ronde.
Un premier procès, en 2009 à Toulouse, avait relaxé "au bénéfice du doute" Serge Biechlin, le directeur du site, et Grande Paroisse. Mais en septembre 2012, la Cour d'appel de Toulouse condamne Serge Biechlin à trois ans de prison, dont un ferme, et 45.000 euros d'amende, et Grande Paroisse à 225.000 euros d'amende.
La Cour de cassation a toutefois annulé cette condamnation en janvier 2015, notamment en raison des doutes pesant sur l'impartialité de l'une des magistrates de la Cour d'appel de Toulouse.
Un troisième procès aura donc lieu, à partir du 24 janvier 2017, mais cette fois-ci devant la Cour d'appel de Paris.
"Nous espérons que la Cour d'appel va apaiser tous les sujets", a déclaré à l'AFP Jacques Monferran, avocat de Grande Paroisse.
Gérard Ratier, président de l'Association des familles endeuillées, y voit lui l'espoir de faire enfin reconnaître que "l'industriel est fautif".
Anne-Marie Capgras, elle, dit "ne rien attendre" du procès. "J'ai plus de 30.000 euros de factures de frais de santé qu'on ne me paie pas. J'aimerais simplement que mon état s'améliore", dit-elle dans un sanglot.
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