Surfant sur les inquiétudes provoquées par l'arrivée d'un million de demandeurs d'asile en 2015, les agressions sexuelles de masse attribuées à des migrants au Nouvel an et deux attentats en juillet revendiquées par les jihadistes de l'Etat islamique, les populistes de l'Alternative pour l'Allemagne (AfD) célèbrent une score retentissant dans le Mecklembourg-Poméranie occidentale, région d'ex-RDA communiste, qui renouvelait son parlement régional.
Avec près de 20,8%, selon des résultats définitifs, ils arrivent derrière les sociaux-démocrates (30,6%) mais s'imposent à la deuxième place devant la CDU de Mme Merkel (19%), une première dans de telles élections régionales.
Le mouvement fortifie du coup sa position à un an des législatives avec cette percée très symbolique dans le fief électoral de la chancelière, qui avait personnellement fait campagne ces dernières semaines.
Le débat national sur l'intégration des réfugiés a éclipsé les enjeux locaux et les alliés bavarois (CSU) de la dirigeante allemande, en opposition frontale depuis des mois avec sa politique d'immigration, sont repartis à l'assaut.
-'Comprendre les peurs'-
Cette élection est "un signal de protestation contre la politique faite à Berlin", a jugé le secrétaire général de ce parti, Andreas Scheuer, demandant à nouveau que la chancelière accepte d'instaurer "un plafond" annuel de réfugiés autorisés à venir en Allemagne.
Le secrétaire général de la CDU, Peter Tauber, a reconnu "une défaite amère" et souligné qu'on "devait comprendre les peurs des gens". "Mais on ne doit pas faire l'erreur de dire que chacun qui vote pour l'AfD est d'extrême-droite et est contre les réfugiés", a-t-il dit.
La presse tire elle la sonnette d'alarme face à la montée de droite populiste en Allemagne, un phénomène d'une ampleur inconnue depuis 1945, alors que la chancelière devait réagir dans la journée depuis la Chine où elle se trouve pour le G20.
"C'était plus qu'une petite élection régionale, c'était une élection sur Merkel : une tempête protestataire dans le nord-est a emporté la CDU qui a glissé derrière l'AfD. Une débâcle pour la chancelière", estime l'hebdomadaire de référence Der Spiegel sur son site.
Le quotidien le plus lu du pays et d'Europe, Bild, s'interroge même sur l'avenir de celle qui depuis 11 ans dirige l'Allemagne et semblait intouchable il y a un an. "Combien de gifles Merkel peut-elle encore supporter?", demande le journal populaire.
L'AfD, désormais représentée dans neuf des 16 parlements régionaux trois ans après sa fondation, aborde la ligne droite vers les législatives de l'automne 2017 en position de force, plaçant son discours de anti-migrants et de rejet du bipartisme et des élites politiques au coeur du jeu politique.
Désormais l'Allemagne n'apparaît plus comme une exception européenne, après avoir semblé épargnée par la progression des partis nationalistes et populistes sur le continent.
- Objectif: couler Merkel -
Au niveau national, les populistes allemands en sont à 14% d'intentions de vote pour les législatives selon un récent sondage, soit un gain de 10 points dans les douze mois qui ont suivi la décision de Mme Merkel d'ouvrir son pays aux demandeurs d'asile.
Si la chancelière n'a pas encore annoncé sa candidature à un quatrième mandat, rares sont ceux à en douter. Du coup, du côté de l'AfD, l'objectif est tout désigné : faire perdre Angela Merkel.
"C'est le début de la fin pour l'ère Merkel", a martelé lundi l'une des chefs du parti anti-migrants, Beatrix von Storch, jugeant que la politique du gouvernement "passe à côté des attentes de la majorité de la population".
L'AfD a d'ailleurs reçu sur ce point les félicitations chaleureuses de la présidente du parti d'extrême droite français Front national, Marine Le Pen.
"Ce qui était impossible hier est devenu possible : les patriotes de l'AfD balaient le parti de Mme Merkel. Toutes mes félicitations !", a déclaré Mme Le Pen sur son compte Twitter.
Et l'AfD se prépare pour une nouvelle percée, le 18 septembre lors des élections du parlement de Berlin.
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