A la "prise de Caracas", comme l'appellent les antichavistes, du nom de l'ex-président Hugo Chavez (au pouvoir de 1999 à 2013), les soutiens du chef de l'Etat socialiste répondent par la "prise du Venezuela", une contre-mobilisation dans le centre de la capitale.
Dès le début de la matinée, des centaines de personnes commençaient à se rassembler dans l'est de la capitale, bastion de l'opposition. "Changement", "Référendum, maintenant", pouvait-on lire sur les pancartes.
"Soit on sort défiler, soit on meurt de faim, le gouvernement ne nous fait plus peur", a déclaré à l'AFP Ana Gonzalez, 53 ans, qui a fait 12 heures de bus.
La ville s'est réveillée quadrillée par la police. Sur les réseaux sociaux, des manifestants de province affirment avoir été empêchés de monter dans des bus, tandis que des barrages policiers filtraient l'accès à Caracas.
Cette journée sous haute tension doit permettre à l'opposition de compter ses soutiens, alors que huit Vénézuéliens sur 10 veulent changer de gouvernement, selon l'institut Datanalisis.
Lors des précédentes manifestations, l'opposition n'a cependant pas réussi à mobiliser en masse. Une faible participation qui s'explique, selon les experts, par les craintes concernant la sécurité, dans un des pays les plus violents du monde.
En 2014, des manifestations antigouvernementales avaient fait 43 morts.
Le Venezuela fait face à une récession économique liée à l'effondrement des prix du pétrole, pourvoyeur de 96% des devises du pays. Faute de dollars pour importer, la pénurie d'aliments et de médicaments atteint un niveau dramatique : 80% sont manquants, selon Datanalisis.
S'y ajoute une crise politique et institutionnelle depuis la victoire de l'opposition aux législatives fin 2015.
Depuis des mois, les antichavistes réclament la tenue d'un référendum révocatoire en 2016, et l'objectif de cette marche est d'accroitre la pression sur le gouvernement pour accélérer le processus.
- le gouvernement a 'peur'-
Les autorités électorales ont en effet dévoilé début août un calendrier qui rend quasiment impossible l'organisation cette année du référendum, évitant ainsi au parti socialiste au pouvoir d'éventuelles élections anticipées.
L'opposition accuse le Conseil national électoral (CNE) d'être à la solde du pouvoir.
Or cette question du calendrier est cruciale. Si le vote est organisé avant le 10 janvier 2017 et couronné de succès, comme le prédisent les sondages, de nouvelles élections seront organisées. Mais s'il se tient après cette date, et que le président est révoqué, il pourra être remplacé par son vice-président.
Selon le leader de l'opposition Henrique Capriles, qui attend un million de personnes à la grande marche de l'opposition, le gouvernement est "désespéré" et a "peur" du niveau de mobilisation.
"Le changement arrive car le peuple veut révoquer la faim, l'insécurité et le manque de médicaments", a assuré Jesus Torrealba, porte-parole des antichavistes, réunis sous la coalition de la Table de l'unité démocratique (MUD, centre droit).
De son côté, M. Maduro a menacé d'emprisonner les dirigeants de l'opposition en cas de violences de la manifestation, accusant les antichavistes de planifier un "coup d'Etat" au lendemain de la destitution de Dilma Rousseff, avec qui il établit un parallèle.
"Qu'ils pleurent ou qu'ils crient, ils iront en prison !", a-t-il prévenu. Mercredi soir, il a menacé de demander la levée de l'immunité de certains parlementaires "pour combattre toutes activités putschistes".
Ces derniers jours, les autorités ont déjà arrêté deux autres leaders antichavistes : Yon Goicoechea, accusé de transporter des explosifs pour la manifestation, et Carlos Melo.
Par ailleurs, l'ancien maire de Caracas d'opposition Daniel Ceballos a été renvoyé en prison pour avoir planifié sa fuite et préparé des actes violents, selon le gouvernement.
Autre signe de fébrilité du gouvernement: l'expulsion de plusieurs correspondants de médias étrangers arrivés au Venezuela pour couvrir la manifestation, dont ceux du quotidien français Le Monde.
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