Il n'aura fallu de fait que quelques minutes après la proclamation des résultats pour que les quartiers populaires de la capitale s'embrasent. En fin de journée, c'était l'Assemblée nationale qui était en flammes et des incendies étaient visibles ailleurs.
Dès le milieu de l'après-midi, des milliers de jeunes, mais aussi des femmes et des hommes d'un certain âge déferlent dans les rues des "mapanes" (bidonvilles) pour crier leur colère dans une ville de facto en état de siège. Leur favori, Jean Ping vient d'être défait d'une courte paille (48%) face au président sortant (49%).
"Ping heho, Ali dégage!", hurlent les manifestants brandissant des tiges de palmier, alors que le ministre de l'Intérieur vient d'annoncer le président sortant vainqueur face à son rival Jean Ping.
Dans les "PK" (sortie de la ville), les quartiers Nzeng Ayong ou encore Nkembo, des détonations lourdes éclatent et des colonnes de fumée noires s'échappent à plusieurs dizaines de mètres dans le ciel.
Sur la voie express, qui contourne la capitale par l'est, des manifestants tentent de rejoindre le quartier général de Ping. Les plus énervés brûlent ce qu'ils trouvent (pneus, poubelles...) sur leur passage.
De nombreux manifestants lèvent les bras en l'air par peur de se faire tirer dessus, d'autres brandissent des pierres.
C'est à quelques centaines de mètres de là qu'a eu lieu plus tôt la proclamation des résultats tant décriés, dans l'enceinte ultra-sécurisée nommée "Cité de la Démocratie".
- 'Ils vont nous massacrer' -
"2009, 2016... On en a marre, on n'en peut plus de se faire voler la victoire, Ali doit partir", s'emporte Boris, la vingtaine, avant d'énumérer les raisons de sa colère.
"Tous les jours c'est la même souffrance: aller 'puiser' l'eau (aux pompes publiques), s'éclairer avec des lampes-tempête à cause des coupures d'électricité, pas de boulot... Il n'a rien fait pour nous".
Les gendarmes anti-émeute dispersent les mouvements de foule vers des ruelles en terre à coups de grenades lacrymogènes et assourdissantes, et de canons à eau.
Si la situation s'envenime, ils sont armés de kalachnikov. Des blindés sont positionnés à plusieurs carrefours stratégiques entourés de très nombreux policiers, gendarmes et militaires avec casques lourds et boucliers.
En retrait sur le bas côté, un quadragénaire, Guy Olsène, regarde les premiers affrontements avec les forces de l'ordre et ne cache pas sa "peur".
"On marche les mains nues, nous n'avons pas de gourdins mais regardez cet arsenal, ils font tout pour provoquer", s'inquiète cet agent municipal: "Ils vont nous massacrer et ce n'est que le début".
La nuit tombe et de nouvelles informations parviennent au milieu de rumeurs invérifiables. L'opposition - notamment Jean Ping via Tweeter - fait état de plusieurs morts et blessés graves, ce que le porte-parole d'Ali Bongo, Alain-Claude Bilie-By-Nze, dément aussitôt, lui aussi sur Tweeter.
A présent, c'est l'Assemblée nationale est à présent en flammes. Un partisan de Ping témoigne sur place: "des manifestants en colère ont brûlé toutes les voitures autour, ensuite ils sont entrés à l'intérieur du bâtiment et ont mis le feu".
Les images de l'AFP sont éloquentes: dans le ciel de Libreville s'élève un immense panache rouge et noir qui dégage une fumée compacte...
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