"Dans l'absolu, avec l'extension des conflits, le nombre de personnes souhaitant trouver asile en Europe par une route ou par une autre est encore plus élevé qu'il y a un an", rappelle Gerald Tatzgern, patron de la lutte contre le trafic de migrants en Autriche.
Et malgré des contrôles renforcés, "on ne peut pas exclure à 100% qu'une telle catastrophe se reproduise", dit-il à l'AFP.
Le 27 août 2015, les policiers autrichiens contrôlant un camion frigorifique abandonné près de la frontière hongroise ont une vision de cauchemar: dans le compartiment étanche, des dizaines de corps d'hommes, de femmes et d'enfants sont enchevêtrés dans un état de décomposition avancé.
Ces migrants, qui fuyaient les conflits en Syrie, en Irak et en Afghanistan, sont morts de suffocation après avoir été embarqués par des passeurs en Hongrie.
Le drame provoque une onde de choc. Le pape François évoque une "offense (à) l'humanité entière". La chancelière allemande Angela Merkel fait savoir que son pays sera désormais ouvert aux réfugiés syriens.
D'autant que début septembre, la photo d'Aylan, un garçon syrien de trois ans, gisant mort sur une plage turque après le naufrage de l'embarcation où il voyageait avec sa famille secoue de nouveau l'opinion.
En quelques mois, des centaines de milliers de migrants transitent par les Balkans et l'Europe centrale à destination principalement de l'Allemagne. A bord de trains et de cars officiels, ils sont accueillis, dans un premier temps, par des dizaines de milliers de bénévoles enthousiastes.
- Poussées populistes -
Mais l'importance du flux, l'infiltration de terroristes parmi les réfugiés, ainsi que les agressions sexuelles à Cologne (Allemagne), attribuées par la police à des migrants essentiellement originaires d'Afrique du Nord, nourrissent l'hostilité d'une partie de la population et alimentent les populismes. Les frontières se referment progressivement.
Le 18 mars, l'Union européenne et la Turquie concluent un accord controversé selon lequel Ankara s'engage à bloquer le passage des réfugiés vers l'UE. Le nombre de migrants transitant par les Balkans et l'Europe centrale décroît.
Cet accord est aujourd'hui compromis: la Turquie menace de le dénoncer si elle n'obtient pas de l'UE la libéralisation des visas pour ses citoyens.
"C'est clair: soit nous appliquons tous les accords ensemble, soit nous les laissons tous de côté", a prévenu mi-août le chef de la diplomatie turque, Mevlüt Cavusoglu, dans la presse allemande.
Le président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker, a lui-même évoqué un risque "élevé" de voir l'accord capoter, après le putsch raté du 15 juillet et les purges massives qui ont compliqué les relations avec Ankara.
- Nouvelles méthodes -
Comme d'autres Etats, l'Autriche a renforcé ses contrôles frontaliers, mobilisant l'armée et des réservistes.
Le pays, qui a accueilli 90.000 demandeurs d'asile l'an passé, soit plus de 1% de sa population, a plafonné à 37.500 le nombre de nouveaux migrants qu'il est prêt à accueillir. Vienne envisage d'activer dès septembre un "décret d'urgence" permettant des refoulements sans dépôt de demande d'asile.
En pratique, le nombre d'arrivées en Autriche est proche de celui d'août 2015 --avant les pics de l'automne--, avec "100 à 150 personnes par jour", selon le ministère de l'Intérieur.
Seule différence: en raison des contrôles, les transports de masse comme celui qui avait conduit à l'hécatombe du 27 août sont plus rares. "Les passeurs privilégient aujourd'hui les voitures particulières", relève M. Tatzgern.
La majeure partie du flux passe désormais par l'Italie. Depuis début 2016, plus de 94.000 personnes ont ainsi traversé la Méditerranée à bord d'embarcations de fortune pour rejoindre ce pays, et plus de 3.100 ont péri en mer, selon l'Organisation internationale pour les migrations (OIM).
Mais l'UE n'est toujours pas parvenue à mettre en oeuvre un plan de répartition équitable entre ses membres, en raison de l'hostilité de plusieurs capitales, à commencer par Budapest.
Arrêtés en Hongrie peu après la découverte du camion charnier, quatre Bulgares et un Afghan sont en détention provisoire. "Nous espérons que l'enquête sera achevée cet automne", indique Gabor Schmidt, du tribunal de Kecskemet (sud de la Hongrie).
Quant aux corps --59 hommes, huit femmes et quatre enfants dont un bébé--, tous, sauf un, ont pu être identifiés. La majorité ont été rendus à leurs proches, les autres enterrés à Vienne.
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