La Cour d'appel de Bordeaux rendra sa décision mercredi après-midi concernant le photographe-écrivain de 69 ans dans ce principal dossier de la tentaculaire affaire Bettencourt.
En première instance, en mai 2015, le Tribunal correctionnel l'avait reconnu coupable "d'abus de faiblesse" et "blanchiment" portant sur plusieurs centaines de millions d'euros aux dépens de l'héritière du groupe de cosmétiques L'Oréal sur laquelle il exerçait "une réelle emprise psychique et morale".
Il avait été condamné à trois ans de prison dont six mois avec sursis et 350.000 euros d'amende, la peine la plus lourde. Il avait été également condamné à verser 158 millions d'euros à la milliardaire au titre des préjudices subis. La même peine a été requise en appel.
Issu d'une famille bourgeoise, François-Marie Banier a d'abord été un adolescent frondeur et autodidacte. Il n'a que 22 ans lorsqu'il publie son premier roman chez Grasset. Le poète Louis Aragon dira de lui: "C'est l'être le plus fou, le plus généreux, le plus drôle que l'on puisse rencontrer".
Le jeune homme, au physique d'éphèbe, devient alors chroniqueur dans la presse parisienne, fréquente les milieux de la mode, écrit des pièces de théâtre.
A partir des années 1970, il devient le "photographe des stars". C'est à cette occasion, qu'il rencontre Liliane Bettencourt, en 1987.
S'ensuit une "amitié de 25 ans" entre la 11e fortune mondiale et "ce chien fou", séduisant et provocateur, qui appelle à midi pour connaître le menu du déjeuner, débarque au guidon de sa mobylette dans l'hôtel particulier de Neuilly-sur-Seine...
- Le renard et la midinette -
Il devient son confident, le premier "à la reconnaître pour ce qu'elle est" et non pour son statut, a plaidé son avocat, Me Pierre Cornut-Gentille. Une relation épistolaire quasi quotidienne s'installe. Il la conseille pour ses achats d'oeuvres d'art, signe un contrat de mécénat avec L'Oréal.
Débute alors l'avalanche de cadeaux en faveur de l'artiste, de 25 ans son cadet: chèques, oeuvres d'art, donations, contrats d'assurance-vie, pour des centaines de millions d'euros. Jusqu'à faire du photographe son légataire universel en 2007 dans un testament finalement révoqué en 2010.
Entre les deux procès, la ligne de défense n'a guère varié: François-Marie Banier a assuré ne pas être un homme d'argent, malgré son patrimoine conséquent: deux immeubles dans le VIe arrondissement de Paris, deux riads à Marrakech, une propriété dans le Gard, des tableaux de maîtres...
Seul le ton a changé. Cabotin, voire grandiloquent à son premier procès, l'artiste a fait profil bas en appel.
Liliane Bettencourt "était une femme extrêmement généreuse, extrêmement reconnaissante", a martelé l'artiste, jugé pour des faits entre 2006 et 2009. "J'ai peut-être eu tort d'accepter beaucoup, c'est énorme, mais elle le voulait", a-t-il soutenu.
"Un escroc", un "briseur de famille" qui a volontairement éloigné la milliardaire de ses proches pour mieux profiter de sa fortune, a rétorqué Françoise Bettencourt-Meyers, fille unique de Liliane et partie civile au procès, à l'origine de la plainte déposée fin 2007 qui déclenchera toute l'affaire.
Le photographe a bien "instrumentalisé" la milliardaire pour satisfaire sa "boulimie d'argent", a soutenu le représentant de l'accusation, l'avocat général Pierre Nalbert, emboîtant le pas au Procureur qui, en première instance, l'avait décrit comme un "flagorneur" digne du "renard des Fables de La Fontaine" qui tenait sous son "emprise totale" une Liliane Bettencourt "midinette" qu'il n'a cessé de manipuler.
Cette relation ambiguë, pour le moins complexe, voire "taboue", avec son protégé, comme le dira à l'audience Patrice de Maistre, l'ex-gestionnaire de fortune de la milliardaire, elle est la seule qui eût pu véritablement l'éclairer. Mais désormais âgée de 93 ans, atteinte de la maladie d'Alzheimer, Liliane Bettencourt a été la grande absente des deux procès du principal volet de l'affaire qui porte son nom.
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