Cela fait des années que les contentieux sur des îles en mer de Chine méridionale polluent les réunions de l'Association des nations d'Asie du Sud-Est élargies aux grandes puissances : Etats-Unis, Chine, Russie, Japon, Corée du Sud, Inde, Australie...
John Kerry, qui milite depuis des années pour que les dix pays de l'Asean (Birmanie, Brunei, Cambodge, Indonésie, Laos, Malaisie, Philippines, Singapour, Thaïlande, Vietnam) adoptent une position commune face à la Chine, a débarqué lundi à la mi-journée à Vientiane.
Mais il était presque trop tard : les dix membres de l'Asean avaient déjà adopté un communiqué commun a minima ménageant Pékin sur les querelles en mer de Chine méridionale.
Cette édition laotienne des réunions de l'Asean, jusqu'à mardi, est la première d'importance pour les acteurs régionaux depuis que la Cour permanente d'arbitrage (CPA) de la Haye a invalidé le 12 juillet les revendications territoriales de Pékin sur la quasi-totalité de cette zone maritime stratégique.
Il s'agit d'un carrefour crucial pour le commerce mondial, la région est de surcroît réputée riche en hydrocarbures. Après la décision de la CPA, la Chine, furieuse, avait promis qu'elle "n'arrêterait jamais" de construire des infrastructures - certaines militaires - sur les îlots disputés.
- Mastodonte chinois -
Face au mastodonte chinois, l'Asean a été incapable de surmonter ses divergences et son communiqué édulcoré ne fait ni référence à Pékin, ni à la CPA.
Les pays membres se contentent de répéter qu'ils sont "gravement préoccupés" par les "revendications territoriales et la multiplication des activités" dans la région et appellent à la "retenue" dans les voies navigables stratégiques.
John Kerry a été tout aussi prudent.
Lui qui dénonçait régulièrement les "provocations" de Pékin et la "militarisation" d'ilots disputés n'a pas visé explicitement la Chine devant ses hôtes de l'Asean. Il a simplement plaidé pour "un système international fondé sur des règles protégeant les droits de tous les pays, qu'ils soient grands ou petits".
Face à son homologue chinois Wang Yi, le ministre américain s'est même félicité que la Chine et les Etats-Unis jouissent de "la relation bilatérale la plus importante dans le monde" et qu'ils "réussissent à gérer leurs différences".
Il faut dire que l'Asean, dont la culture diplomatique est fondée depuis 1967 sur le consensus, est en revanche divisée à propos de la mer de Chine méridionale. Quatre de ses membres (Vietnam, Philippines, Malaisie et Brunei) ont des prétentions concurrentes à celle de la Chine, laquelle est une alliée du Cambodge, du Laos, voire de la Thaïlande.
Diplomates et experts ont accusé Phnom Penh, proche de Pékin, d'avoir sapé les efforts vers une déclaration conjointe qui aurait poussé Pékin à respecter la décision de la CPA.
"Nous devions sortir une déclaration. (...) Nous ne voulions pas que le monde dise que l'Asean est sens dessus dessous", a justifié auprès de l'AFP un diplomate. En 2012 en effet, les réunions de l'Asean présidées par le Cambodge s'étaient achevées sans communiqué commun en raison de désaccords sur la mer de Chine.
Le groupe régional s'est aussi penché sur les graves tensions de la Péninsule coréenne.
Le nouveau ministre des Affaires étrangères de la Corée du Nord, Ri Yong-Ho, était à Vientiane où il a rencontré le Chinois Wang Yi, dont le pays est l'allié de Pyongyang.
Aucune rencontre en revanche n'est prévue entre John Kerry et ce diplomate nord-coréen chevronné qui suit depuis 20 ans les dossiers des relations conflictuelles avec les Etats-Unis. Mais il n'est pas dit que les deux ministres ne se croisent pas dans un couloir.
En recevant son homologue sud-coréen Yun Byung-Se, John Kerry a d'ailleurs encore dénoncé l'"irresponsabilité" de la Corée du Nord pour ses programmes militaires nucléaire et de missiles balistiques sous sanctions internationales.
Le ministre de Séoul s'est targué d'une "alliance plus forte que jamais" avec Washington.
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