Les témoignages recueillis par les enquêteurs depuis l'attentat commis jeudi soir sur la Promenade des Anglais permettent de brosser le portrait d'un jeune homme "très éloigné des considérations religieuses, ne pratiquant pas la religion musulmane, mangeant du porc, buvant de l'alcool, consommant de la drogue et ayant une vie sexuelle débridée", a détaillé lundi le procureur de la République de Paris, François Molins.
Un homme de 74 ans entendu par les enquêteurs est même présenté par certains comme un des amants du jeune homme.
La caractère prémédité de son attaque ne fait aucun doute, et plusieurs éléments viennent accréditer l'hypothèse d'une radicalisation rapide, survenue en quelques semaines ou quelques mois, a poursuivi le magistrat.
Le 1er janvier, il prend en photo un article de Nice-Matin titré "Il fonce volontairement sur la terrasse d'un restaurant". Depuis huit jours, il s'était laissé pousser la barbe, l'expliquant par une "signification religieuse" et évoquant l'Etat islamique. De nombreux documents "en lien avec l'islam radical" ont aussi été retrouvés sur son ordinateur.
- 'Faire le beau' -
Une voisine du petit immeuble qu'il habitait depuis que sa femme et lui étaient séparés -et à qui il a essayé de "louer" une boîte aux lettres- a aussi raconté à l'AFP un épisode récent, survenu pendant l'Euro de football, au cours duquel Mohamed Lahouaiej Bouhlel lui avait confié ne pas boire d'alcool: "J'ai rigolé, je lui ai dit: +Quoi, tu ne bois pas, tu fais le carême?+ Il m'a dit: +Non, mais je ne bois pas.+"
Arrivé en France depuis la Tunisie en 2005, le chauffeur-livreur né le 31 janvier 1985 en Tunisie avait régularisé sa situation l'année suivante et épousé une Niçoise franco-tunisienne, avec qui il a eu trois enfants. Le couple, en instance de divorce, était toujours habillé à l'occidentale, selon tous les témoignages recueillis par l'AFP.
Son père, interrogé en Tunisie par l'AFP, avait perdu depuis longtemps le contact avec ce fils, qui n'avait selon lui "aucun lien avec la religion": "Il ne faisait pas la prière, il ne jeûnait pas, il buvait de l'alcool, il se droguait même."
Les habitués de la petite salle de sport que le chauffeur-livreur fréquentait à Nice jusqu'à il y a deux ans environ, se souviennent d'un "frimeur", un "dragueur" un peu "lourd", rapporte un témoin. Là, le jeune homme avait même pris des cours de salsa, et "venait faire du sport pour faire le beau".
Dans la petite cité périphérique du nord de Nice où Lahouaiej Bouhlel vivait avec son épouse avant leur séparation, il ne fréquentait pas la mosquée locale et buvait des bières, confirment plusieurs membres de "l'Association cultuelle de Nice Nord".
Après une altercation violente avec son épouse, cette dernière avait demandé le divorce et Lahouaiej Bouhlel avait déménagé seul dans un appartement situé dans un quartier populaire de l'est de Nice, il y a au moins 18 mois.
- 'Il cassait tout ce qui se trouvait devant lui' -
Placée en garde à vue pendant 48 heures, son ex-épouse subissait "des coups répétés de son mari, des violences physiques et du harcèlement", a déclaré son avocat, Me Jean-Yves Garino. Selon ce dernier, elle n'a pas assisté à un quelconque processus de radicalisation de son mari: ""Elle ne vivait plus avec lui, elle le croisait juste quand il venait voir ses enfants dans un jardin public."
Le chauffeur-livreur était connu de la justice pour des faits de menaces, violences, vols et dégradations commis entre 2010 et 2016. Le 24 mars, il avait été condamné à Nice à six mois de prison avec sursis pour des violences volontaires avec arme -une "palette"- commises en janvier, lors d'une altercation liée à un accident de la circulation.
Son père, Mohamed Mondher Lahouaiej Bouhlel, décrit lui aussi un jeune homme souffrant d'accès de violence, ayant eu entre 2002 et 2004 "des problèmes qui ont provoqué une dépression nerveuse. Il devenait colérique, il criait, il cassait tout ce qui se trouvait devant lui".
Un habitant de son ancien immeuble "Le Bretagne", où le tueur vivait avec son épouse avant leur séparation, se souvient d'un homme ayant des problèmes relevant de la "psychiatrie": "Il faisait des crises. Quand il s'est séparé de sa femme, il a déféqué partout, trucidé le nounours de sa fille à coups de poignard et lacéré les matelas."
"L'adhésion à ces mots d'ordre (d'appels au meurtre émanant d'organisations terroristes), la radicalisation, peut intervenir d'autant plus rapidement quand elle s'adresse à des personnalités perturbées, ou à des individus fascinés par l'ultra-violence", a conclu lundi François Molins.
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