"La musique bouleverse les patients au point que cela a un impact sur eux-mêmes et sur la douleur liée aux examens" indique le Dr Jean-Marie Gomas, coordinateur du Centre Douleurs Chroniques et Soins Palliatifs de l'hôpital, qui dépend de l'Assistance publique-Hopitaux de Paris (AP-HP).
Un des pionniers en matière de soins palliatifs en France, le Dr Gomas a été convaincu de l'intérêt de l'art-thérapie grâce à sa rencontre avec la violoncelliste musicothérapeuthe Claire Oppert.
Le jeune femme, qui travaillait alors auprès de patients atteints d'Alzheimer dans des Ehpad (maisons de retraite), accepte de participer à un projet structuré visant à mesurer les effets bénéfiques de séances de musique vivante chez des patients en soins palliatifs, souvent soumis à des soins douloureux (pansement d'escarre, toilette, pose de cathéter veineux...).
"Les premiers résultats sont extraordinaires, la plupart des patients sont touchés au plus profond d'eux-mêmes" explique la musicienne à la voix douce.
Forte d'une longue expérience de musique vivante auprès des patients, elle précise que même chez ceux qui sont dans le coma, "on sent une décontraction au niveau de la respiration".
"On ne guérit pas, mais on cherche à s'adresser à la partie saine de la personne malade", poursuit la violoncelliste.
Financé par le Fondation Apicil qui lutte contre la douleur, le projet a débuté en 2014. Il s'est fixé comme objectif de mesurer les effets d'une à trois séances de musique vivante jouée en direct lors d'actes douloureux, dans les chambres de 200 patients. Chaque séance se construit en collaboration avec l'équipe médicale et la famille.
- Rock maghrébin -
92 patients ont déjà reçu à ce jour "le pansement Schubert", une référence à la première art-thérapie musicale réussie de Mme Oppert en Ehpad: les soins chez une malade douloureuse, explique-t-elle, n'étaient possibles que lorsqu'elle jouait le mouvement lent du deuxième trio de Schubert.
Son répertoire s'est considérablement étoffé depuis: Brahms, Mozart... mais aussi de la musique japonaise, voire du rock maghrébin "lorsqu'on me le demande".
Elle précise avoir choisi le violoncelle car c'est un instrument proche de la voix humaine, "avec des fréquences facilement accessibles" quel que soit le niveau socio-culturel ou l'état cognitif du patient.
L'idée est de provoquer une "contre-stimulation sensorielle", soit réduire un excès de stimulation chez des patients confrontés à des douleurs aigües ou chroniques, explique le Dr Gomas.
"Les séances se construisent en collaboration avec l'équipe médicale et la famille. Elles durent en moyenne 15 à 20 minutes mais peuvent durer plus ou moins longtemps, selon l'état de santé des patients. Rares sont ceux qui refusent (moins d'un sur dix), en général parce qu'ils se sentent +trop fatigués+".
Sont notamment évalués la tension artérielle et la fréquence respiratoire, mais aussi le ressenti émotionnel du malade et de son entourage. La douleur est estimée soit par des échelles d'auto-évaluation, soit comportementales.
La musicothérapeute recueille pour sa part les paroles des malades. Elle en a déjà rassemblé plus de 250, qu'elle compte publier un jour.
Des résultats préliminaires de l'étude font état d'une atténuation de la douleur de 10 à 30%, mais "tout n'est pas forcément quantifiable", note de son côté Nathalie Aulnette, directrice de la Fondation Apicil.
Elle ajoute que le problème est désormais de "pérenniser" les expériences d'art-thérapie menées dans les hôpitaux et qui portent également sur la danse, le théâtre, ou la peinture.
Ces expériences viennent s'ajouter aux autres méthodes recommandées par la Haute Autorité de Santé (HAS) comme la sophrologie, l'hypnose ou la relaxation pour le soulagement des douleurs.
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