James Jean-Baptiste sort rarement sans une paire de jumelles autour du cou. Cet ornithologue du Groupe ornithologique normand (GONm) n’a en effet de cesse d’observer les oiseaux de la région et particulièrement, ceux de la prairie de Caen car, si beaucoup la qualifie de terrain propice au footing ou au vélo, elle est avant tout un site d’observation exceptionnel. “C’est un endroit sauvage en pleine ville. Des oiseaux de l’Europe entière y passe”, explique Jean-Marc Lefèvre, responsable du service environnement de la Ville de Caen. “C’est milieu atypique que certain qualifie de fouillis mais c’est dans ce fouillis qu’il y a de la biodiversité !”, surenchérit James Jean-Baptiste. Ce dernier a, ce jour-là, posé un filet japonais en plein cœur d’une roselière de la prairie. Une opération qu’il renouvelle une vingtaine de fois par an afin de baguer les oiseaux. “Le baguage permet d’obtenir un maximum d’information sur l’oiseau : son âge, sa taille... Et puis je regarde s’il a un taux de graisse suffisant”.
Un îlot comme zone refuge
Dans son filet, James Jean-Baptiste a capturé un phragmite des joncs qui vient, chaque année, se reproduire en France et qui aime spécifiquement les milieux humides comme celui de la praire. “Il va repartir d’ici un petit mois sur la côte ouest africaine. Il va passer l’hiver là-bas, et l’année prochaine, en avril, il va certainement revenir nicher ici. C'est un cycle”. Conscient de cette vérité, la Ville cherche à préserver cet espace biologiquement riche, en laissant par exemple volontairement pousser la végétation par endroit pour en restreindre l’accès. “Ici, il y a des oiseaux mais aussi des libellules, des batraciens, des petits mammifères comme le campagnol amphibie. Il ressemble à un petit rat".
"La mare est en train de dépérir"
"Pour les oiseaux, un petit îlot a aussi été aménagé dans le passé pour leur permettre d’avoir une zone refuge”, souligne Jean-Marc Lefèvre. Seules quelques chèvres y sont parfois introduites pour débarrasser le secteur de ses ronces et autres plantes invasives. “Mais la mare est en train de dépérir. C’est un cycle naturel”, ajoute l'ornithologue. “Nous travaillons en ce moment à la valorisation de cet îlot et sur un plan de gestion de cette marre afin qu’elle soit intéressante pour les oiseaux et aussi d’un point de vue botanique, piscicole et entomologique”, indique de son côté l’agent de la ville. Quoiqu’il en soit, cela n’empêche pour l’instant pas la valse régulière des oiseaux sur la prairie. “Il y a un mouvement en permanence”, relate James Jean-Baptiste. “La prairie est une étape”, poursuit Jean-Marc Lefèvre. “Les oiseaux s’y arrêtent pour se ravitailler, avant leur destination finale. C’est pour cela que si cette prairie disparaît, l’oiseau disparaîtra aussi”. Il arrive par ailleurs parfois que sur la prairie de Caen des oiseaux rares soient aperçus. “Il y a deux ans, j’ai capturé un euplecte vorabé qui vit en Afrique. Il n’avait strictement rien à faire ici. C’était même la première fois qu’il était vu en Normandie!”, se souvient James Jean-Baptiste. Jean-Marc Lefèvre aime lui à observer sur la prairie, le criquet ensanglanté. “C’est un criquet d’assez belle taille, il a les fémurs qui sont entièrement rouges...” Criquet qui lui-même sera un jour mangé par un oiseau. Une vraie chaîne. Celle, finalement, de l’espèce humaine.
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Création
Le Groupe ornithologique normand (GONm) existe depuis 1972, à Caen. Les premières données concernant la prairie remontent à l’année 1974.
Données
Depuis le 31 décembre 2010, 7 535 données relatives aux oiseaux ont été collectées sur le site de la prairie. Elles concernent un total de 165 espères. A l’échelle de la ville, 212 espères ont déjà été observée. En Normandie, 451 espères d’oiseaux ont été observées au cours du temps. Par conséquent, 37% des espèces observées sur les cinq départements normands l’ont aussi été sur le site de la prairie de Caen.
Noms farfelus
Sur les 165 espèces observées sur la prairie de Caen, certaines ont des noms farfelus : le gobemouche gris, le butor étoilé, le chevalier gambette, la linotte mélodieuse ou encore le rougequeue à front blanc ! Poétique !
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