"Je ne comprends pas comment, quelques heures seulement après les explosions, les morts et les blessés, les vols ont pu reprendre normalement et les voyageurs se rendre sur les lieux des explosions", dit à l'AFP un employé d'une agence de tourisme dans l'aéroport.
Jeudi, à l'aéroport Atatürk d'Istanbul, les mesures de sécurité ne semblaient pas spécialement renforcées, au surlendemain du triple attentat-suicide qui a coûté la vie à 43 personnes, et que le gouvernement turc a rapidement lié au groupe jihadiste Etat islamique (EI).
Dans les files d'attente interminables aux comptoirs d'enregistrement, dans les cafés et les couloirs de l'aéroport, des voyageurs discutent allègrement en français, portugais, arabe, à côté d'une façade en verre brisée ou sous un plafond défoncé par l'explosion d'un kamikaze.
Certains se prennent en photo devant ce décor de guerre, pendant que des ouvriers s'emploient doucement à réparer ce qui peut l'être.
Pour pouvoir accéder aux halls des arrivées et des départs, les voyageurs et leurs bagages doivent passer par des portiques de sécurité, mais les portes de sortie ne sont, elles, contrôlées que par un garde, muni uniquement d'une batte, a constaté une journaliste de l'AFP.
C'est par l'une de ces portes de sortie que l'un des kamikazes a pu pénétrer à l'intérieur du bâtiment avant de se faire exploser, ont rapporté plusieurs témoins sur place, tandis qu'un garde de l'aéroport a assuré que le "terroriste est passé par les portiques de sécurité en tirant sur les gardes".
"Les terroristes portaient de gros manteaux noirs dans lesquels ils cachaient leurs armes, alors qu'il faisait très chaud", raconte Akin Duman, chauffeur de taxi d'une cinquantaine d'années. "C'est à cause de leur tenue qu'ils ont été repérés". Le Premier ministre Binali Yildirim avait affirmé que les kamikazes avaient caché leurs armes dans des valises.
- 'A l'image de la Turquie' -
Nazife Yurtcü, une jeune Turque résidant en Allemagne est arrivée jeudi à Istanbul pour rendre visite à sa famille, malgré les craintes qu'elle a sur la sécurité. "Sachant que des kamikazes ont pu pénétrer à l'intérieur de l'aéroport avec des armes et des bombes, j'aurais été rassurée de voir plus de policiers aux entrées et sorties", dit-elle.
Le Premier ministre avait assuré après les attentats de mardi que la "présence de personnel entraîné" serait "accrue" dans les aéroports du pays.
"Il n'y aura pas davantage de mesures de sécurité", soupire un garde de sécurité qui était de service au moment de l'attentat à Atatük, 3e aéroport d'Europe. "Rien n'a changé et rien ne changera".
"Ce qui s'est passé est à l'image de la Turquie", dit-il sous couvert de l'anonymat, en jetant des regards méfiants autour de lui. "On nous a donné l'ordre de ne pas parler aux journalistes", chuchote-t-il, sans donner plus de précisions.
Derrière une vitre brisée, un employé kurde d'une agence de location de voiture semble moins embarrassé de témoigner. "Je m'étais absenté quelques heures pour rompre le jeûne (du ramadan) quand les explosions se sont produites. Dieu m'a sauvé", affirme ce trentenaire qui dit ne pas faire confiance au gouvernement.
"Il n'est de secret pour personne que l'AKP (Parti de la justice et du développement du président Recep Tayyip Erdogan) préfère concentrer ses efforts sur la lutte contre les Kurdes plutôt que de s'attaquer aux vrais terroristes", déplore-t-il.
"Ce n'est pas la sécurité qui est défaillante, c'est le gouvernement", soutient l'employé de l'agence. "C'est sa politique extérieure, entre son soutien non déclaré aux jihadistes de l'EI et son rapprochement avec la Russie et Israël qui nous vaut toutes ces attaques", soutient-il.
Plus loin, entouré de sa femme et de deux enfants en bas âge, un père de famille turc pousse un chariot avec plusieurs valises.
"Les attaques? La sécurité? Je n'ai pas le temps d'y penser, la vie continue, ici comme à Paris et en Belgique", dit-il avant de se diriger, le sourire un peu inquiet, vers la porte d'embarquement.
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