Le procès qui s'annonce est bien éloigné de l'ampleur donnée aux faits lors des premières interpellations, le 10 novembre 2008, au sortir d'un week-end marqué par plusieurs incidents sur les lignes TGV causant des retards pour des milliers de passagers.
Accusée d'instrumentaliser l'affaire, la ministre de l'Intérieur Michèle Alliot-Marie avait vu dans ce dossier le symptôme des "risques de résurgence violente de l'extrême gauche radicale".
Au final, sur les huit futurs prévenus, quatre sont renvoyés en procès pour association de malfaiteurs, dont Julien Coupat et son ancienne épouse Yildune Levy à qui sont spécifiquement reprochées les dégradations commises sur des lignes TGV dans la nuit du 7 au 8 novembre 2008 à Dhuisy (Seine-et-Marne). Les quatre autres seront jugés pour faux ou refus de prélèvements d'ADN à la suite de leurs arrestations.
Mais comme les juges chargés de l'enquête dans leur ordonnance à l'été 2015, la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris a écarté toute dimension terroriste pour les quatre principaux mis en cause.
Le parquet général et les parties ont cinq jours pour déposer un éventuel pourvoi en cassation contre cette décision.
"C'est un désaveu total pour le parquet, qui s'acharnait à nous dire que la France a été terrorisée par un livre", "L'insurrection qui vient", et "des retards de train", s'est félicitée Marie Dosé, l'avocate d'Yildune Levy. "Une page se tourne. La prochaine, c'est d'obtenir la relaxe au tribunal", a-t-elle ajouté.
- Pas de déraillements possibles -
Le parquet de Paris, qui avait fait appel de la décision des juges d'instruction, s'appuyait sur le fameux pamphlet signé par le Comité invisible, qu'il attribue à Julien Coupat, lequel nie en être l'auteur.
Dans ses réquisitions, le parquet estimait que le texte ne laissait "aucun doute quant à la finalité de renverser par la violence l'Etat et détruire la société occidentale actuelle". Ainsi, les premiers sabotages n'auraient été que les prémices d'un dessein plus large, comme l'aurait aussi montré une "recherche de conflits avec les forces de l'ordre" lors de manifestations à Paris et Vichy à l'automne 2008.
Dans leur ordonnance, les juges d'instruction estimaient au contraire que malgré "le dessein patent de désorganiser le fonctionnement d'un rouage considéré comme étatique, la SNCF", et au-delà du préjudice, du trouble à l'ordre public et des désagréments pour les usagers, "ces actions ne sauraient être considérées, malgré la rhétorique guerrière employée, comme ayant, à un moment ou à un autre, intimidé ou terrorisé" la population.
Une analyse en partie reprise par les magistrats de la chambre de l'instruction. D'après une source proche du dossier, ils estiment dans leur décision que les actes de sabotage ne pouvaient pas provoquer de déraillements mais seulement des retards de trains ou une perturbation du trafic. Un constat qui s'appuie sur les auditions de professionnels et les expertises conduites pendant l'enquête.
"La chambre de l'instruction n'a pas suivi le délire du parquet", ont réagi Louis-Marie De Roux et Jérémie Assous, avocats de Julien Coupat et d'autres membres du groupe. "Mais elle aurait pu aller plus loin" et ordonner un non-lieu général, "car elle avait tous les éléments pour juger que cette instruction reposait sur des faux témoignages suscités par les enquêteurs et des faux procès-verbaux", ont-ils ajouté, promettant une rude bataille au procès.
Au-delà de l'abandon des poursuites pour terrorisme, les faits eux-mêmes ont une dimension plus relative. La chambre de l'instruction a confirmé le non-lieu pour plusieurs dégradations de lignes ferroviaires dans la nuit du 7 au 8 novembre 2008, et pour celles commises à Vigny dans la nuit du 25 au 26 octobre. Le procès portera donc sur le seul épisode de Dhuisy.
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