Le mets, préparé traditionnellement avec de la viande de boeuf, des pommes de terre, des rutabagas et des oignons, compte parmi les dizaines de spécialités britanniques bénéficiant d'une Indication géographique protégée (IGP) de l'UE, au même titre que le whisky écossais ou le pâté en croute de Melton Mowbray.
Dans les Cornouailles, région du sud-ouest de l'Angleterre dont ces petits chaussons sont un symbole, des fabricants s'inquiètent d'une sortie du Royaume-Uni de l'Union européenne à l'issue du vote de jeudi.
Pour Marion Symonds, patronne de Portreath Bakery, la perte du label européen obtenu en 2011 compromettrait la qualité de ce mets très prisé des Anglais. Car d'autres produits similaires, fabriqués hors des Cornouailles, pourraient dès lors s'approprier le nom de "Cornish pasties".
"Dans les Cornouailles, vous ne trouverez jamais une +pasty+ à la carotte, c'est un tabou", explique-t-elle à l'AFP.
"Mais si vous sortez de la région - et je l'ai vu de mes propres yeux, à Londres et ailleurs -, vous trouverez des copies avec de la bouillie à l'intérieur", dit-elle avec dégoût.
- Une gourmandise de campagne -
L'industrie des "Cornish pasties" représente 65 millions de livres (80 millions d'euros) par an pour la région, avec à la clef quelque 2.000 emplois.
Mais sans l'indication IGP, le secteur pourrait péricliter, met en garde Marion Symonds qui gère ce qu'elle présente comme le tout premier service "drive-in" de vente de pasties.
Si on en croit la légende, ces spécialités culinaires ont été popularisées au XIXe siècle par les mineurs d'étain, qui s'en délectaient sous terre, sans toutefois manger la croûte, potentiellement contaminée par l'arsenic des mines.
La recette d'alors a parcouru le monde au gré des voyages, et elle est toujours appréciée aujourd'hui en Australie ou au Mexique.
L’association des Cornish Pasty, qui représente l'industrie locale, est récemment entrée dans le débat en se déclarant pour le maintien dans l'UE, au motif qu'il serait "particulièrement inapproprié" de risquer de perdre la précieuse IGP.
Le Premier ministre conservateur David Cameron a lui-même mis en garde plus largement contre le danger qui guette le statut dont jouissent les produits régionaux britanniques en cas de rupture avec l'UE.
Les pasties ont aussi été récupérées par le camp adverse: Boris Johnson, ancien maire conservateur de Londres et champion des pro-Brexit, est même allé jusqu'à en brandir un lors d'une étape de son bus de campagne, le mois dernier dans les Cornouailles.
- Pasties, avenir flou -
Difficile de savoir si la spécialité perdra effectivement son IGP, aucun pays n'ayant encore jusqu'à présent pris la décision de tourner le dos à l'UE. Sans doute y aurait-il une période de flou, puis un accord de réciprocité sur les appellations entre autorités britanniques et européennes.
Reste que parmi les fabricants des Cornouailles, il y a aussi des partisans d'une sortie du giron européen. John Beard par exemple, le patron de Pasty Line, une entreprise qui confectionne les fameuses gâteries pour boulangeries, pubs ou maisons de repos, depuis 1993.
L'IGP est certes "très utile", admet-il. Ce qui le dérange, en fait, c'est le tombereau de réglementations bureaucratiques imposé, selon lui, par les institutions européennes aux entreprises.
"C'est à vous donner mal à la tête", grince-t-il tandis que, dans son dos, des employés remplissent des rangées de chaussons de boeuf cru et de légumes, avant qu'ils ne soient refermés, puis cuits.
Et il déplore "toutes ces règles et autres réglementations faites par quelqu'un se trouvant à des milliers de kilomètres".
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