Le parti d'extrême droite se méfiait du "Rendez-vous de Béziers" organisé par M. Ménard. L'ancien journaliste est un contempteur du programme économique du FN et de son positionnement "ni droite ni gauche". Il prétendait de surcroît réunir la "droite hors les murs", insatisfaite par l'étatiste FN comme par les "européistes" des Républicains, afin de peser sur la présidentielle.
L'agacement est monté peu à peu dans la semaine, la députée du Vaucluse, mandatée par Marine Le Pen, hésitant jusqu'au dernier moment à honorer son invitation mais finalement présente.
Premier couac: l'annonce mercredi par M. Ménard du lancement d'un mouvement citoyen "Oz ta droite", vu ar les frontistes comme un potentiel concurrent du FN.
Ensuite, la fuite dans la presse de premières propositions radicales (non-renouvellement des titres de séjour tant que le chômage ne descend pas sous les 5%; 25% de fonctionnaires en moins sur cinq ans; etc.), alors que celles-ci ne devaient être bouclées que dimanche.
La goutte d'eau fatale a été une déclaration de M. Ménard samedi: le maire n'entend être un marchepied "de personne" et notamment pas du FN, mais promet une démarche "offensive" pour faire adopter par droite et extrême droite sa cinquantaine de propositions "surprenantes".
Très rapidement, la députée du Vaucluse Marion Maréchal-Le Pen, proche idéologiquement de cette mouvance et très populaire parmi ses représentants, a annoncé son départ de Béziers face à l'"erreur politique majeure et historique" de M. Ménard. Elle lui a reproché de nier l'actuel caractère "incontournable" du Front national.
"L'idée c'est : +On veut vos voix et pas vos gueules+", a pesté la benjamine de l'Assemblée nationale, pourtant régulièrement suspectée d'indiscipline à l'égard de sa tante et présidente du FN, Marine Le Pen. Dans l'après-midi, elle a indiqué toutefois qu'il n'y avait ni "rupture" ni "drame" avec M. Ménard, élu avec le soutien du parti d'extrême droite à la mairie de la sous-préfecture héraultaise en 2014.
- 'Il ne sortira rien' de ce rendez-vous -
L'ancien patron de Reporters sans Frontières a aussi tenté de dédramatiser et mis le départ de la députée sur le compte de pressions externes, venant notamment de Florian Philippot: "Je la remercie d'être venue (...). Elle a des gens autour d'elle qui ne veulent pas entendre parler d'une ouverture au-delà du FN. Elle subit des pressions."
Mais de nombreux lieutenants frontistes s'en sont pris dans l'après-midi à M. Ménard, accusé par exemple par le sénateur frontiste David Rachline d'avoir "la grosse tête".
Avant même l'annonce du départ de Mme Maréchal-Le Pen, un proche de la patronne du FN donnait "peu d'avenir" à la stratégie de M. Ménard : il "découvre la force des partis politiques face aux causeries".
Cette force s'est aussi exprimée par la discrétion des représentants de la droite, également visés par l'initiative du maire de Béziers. A part Jean-Frédéric Poisson, candidat à la primaire de la droite via le Parti Chrétien-démocrate, aucun autre candidat Les Républicains à Béziers. Nicolas Dupont-Aignan, candidat à la présidentielle Debout la France, a aussi décliné l'invitation.
Restent des débats et de nombreuses tables rondes, jusqu'à dimanche matin, et un millier d'invités.
Lors d'une table ronde dans la matinée sur l'économie, "Plutôt Colbert ou plutôt Thatcher?", un chef d'entreprise en colère avait constaté: "Marine Le Pen, sans nous elle ne peut rien, et nous, sans Marine Le Pen on ne peut rien."
Dans l'après-midi, un virulent débat sur l'immigration, émaillé de propos anti-islam et immigration et de propositions radicales, telle la "remigration" des immigrés (et non des seuls étrangers), s'est tenu dans le Palais des congrès Bitterrois, devant lequel ont manifesté 400 à 600 personnes à l'appel de partis et syndicats de gauche.
"Une petite mouvance d'extrême droite était instrumentalisée contre le FN. Elle a fait flop aujourd'hui à Béziers. Les patriotes eux avancent!" a triomphé Florian Philippot dans un tweet, au milieu d'échanges acrimonieux avec M. Ménard.
Pour une fois, il n'a guère été contredit par Mme Maréchal-Le Pen, pour qui la conclusion ne souffrait pas d'attendre dimanche: "Il ne sortira rien de ce séminaire."
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