"Nos familles se sont battues sous les couleurs allemandes, parce qu'à l'époque la Pologne n'existait pas", raconte ce trentenaire à la barbe fournie. "Alors on est aussi ici pour raconter leur histoire."
Un peu plus haut, sous le monument aux morts de la ville devenue capitale mondiale de la paix où sont attendus dimanche François Hollande et Angela Merkel, Guillaume Couturier, 30 ans, et Guillaume Decaux, 25 ans, font une pause, juchés en tenue de poilu sur des vélos d'époque.
Tous deux passent leurs week-ends à fouiller les brocantes et les foires pour trouver le petit objet qui rendra le costume parfait - qu'ils participent à une reconstitution époque Louis XV ou aux commémorations de Verdun.
Le plus jeune, venu tout spécialement de Normandie, sort triomphalement une boite de cirage de sa musette - d'époque. Jaune, à l'effigie du poilu, elle aussi date de 1914 et est très rare, raconte-t-il.
Les costumes, eux, ont été faits sur mesure. "On est beaucoup beaucoup trop grands pour les tenues d'époque", raconte le trentenaire, employé en grande surface dans le Gers, qui dépasse en effet allègrement le mètre 90.
C'est une couturière professionnelle qui lui a fait sa veste - spécialement pour cette reconstitution, car il voulait changer de l'autre veste de poilu qu'il porte d'habitude. "Nous, on coud les petites choses, les boutons. Un peu comme les poilus, en fait!"
Habitués des manifestations en costumes, ils reconnaissent que celle-ci est "unique" : "on se devait d'y assister."
Derrière eux, deux femmes en tenues d'infirmière, musettes en bandoulières, sont également émues d'être là. Le grand-père de Muguette a fait la guerre, aux Eparges.
"C'est hyper important de montrer ça aux jeunes, parce que quand même, des hommes ont perdu la vie. Il fallait y aller, dans les tranchées!", explique Claudine.
La jeunesse et la transmission sont les deux thèmes placés au coeur des commémorations de dimanche, selon le voeu de l'Elysée, alors que plus aucun poilu n'est encore en vie pour témoigner.
Devant l'ossuaire de Douaumont, nécropole nationale où reposent 160.000 soldats, ils seront 4.000 adolescents de 14 à 16 ans, français et allemands, à réaliser dimanche une chorégraphie.
La moitié d'entre eux est arrivée à Verdun dès jeudi, pour quatre jours d'ateliers pédagogiques et de visites.
Verdun, "c'était horrible", résume Jenna, jeune allemande de Sarre, en sortant d'un atelier pédagogique organisé par l'Office franco-allemand de la jeunesse (Ofaj).
- 'On peut se comprendre' -
Sous de grandes tentes blanches, répartis par petits groupes, les jeunes parlent de la guerre et décryptent des images de propagande.
Dans l'une d'elles, un binôme franco-allemand présente une affiche montrant un soldat allemand et légendée "la bête féroce sent venir la fin".
"Le message, c'est que les Allemands sont cruels", analyse un jeune Allemand.
"Et aujourd'hui, il y a encore de la propagande ?" demande l'animatrice. Regards interrogatifs des ados, plutôt tentés de dire non.
"Ben si, en Syrie, avec les..." ose un Français en mimant une exécution. "Oui! Ou en Allemagne contre les émigrés", rebondit un jeune Allemand dans un français parfait.
La bonne maîtrise du français, c'est ce qui a le plus marqué Maëly, venue de Martinique avec une partie de sa classe, à propos de ses homologues allemands. Avec le fait qu'ils "détestent le fromage !!!", ajoute-t-elle.
Mais pour le reste, "on écoute la même musique, on regarde les mêmes choses... On peut se comprendre", estime Justin, 16 ans, venu de Sarre.
Les jeunes soldats des deux pays étaient-ils différents, eux, pour se battre dans les tranchées? "Non", pense Amélie, "on les a envoyés, c'est pour ça" qu'ils se sont entretués.
Alors une autre guerre entre jeunes Français et Allemands est encore possible ? "Non, on a le traité de l'Elysée maintenant!" Preuve que les leçons des ateliers pédagogiques ont marqué des esprits.
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