La mosquée a été édifiée à partir de 1644 sur les ordres de l'empereur moghol Shah Jahan, plus connu pour avoir fait construire en Inde l'immense mausolée du Taj Mahal en mémoire de son épouse, morte en couches en 1631.
Selon cette légende, ses fondations ont été retrouvées détruites un matin. Les conseillers du gouverneur moghol du Sindh, province du sud du Pakistan où se trouve la mosquée, lui ont alors suggéré de trouver quelqu'un de "si pieux qu'il n'a commis aucun péché de sa vie" pour poser la première pierre.
Le message a été transmis à l'aide de cloches, appelant les hommes répondant à ces conditions à se rendre de nuit dans l'enceinte de la future mosquée, dans la ville de Thatta. Et au matin, 450 briques étaient en place dans les fondations.
"C'est ainsi que les travaux de construction ont démarré", raconte Syed Murad Ali Shah, descendant du gouverneur en question, Amir Khan.
"A cette époque bénie, il y avait des centaines d'hommes pieux et de saints, mais aujourd'hui il n'y en a plus pour restaurer la mosquée", déplore-t-il devant le lieu de culte multiséculaire.
Achevée en 1647, cette mosquée aux dômes ocres et ornements azur est l'un des rares bâtiments construits en dehors de Lahore, la capitale culturelle du Pakistan, par la dynastie moghole qui a régné sur le sous-continent jusqu'au XIXe siècle.
C'était la principale mosquée de Thatta, qui fut pendant des siècles un chef-lieu régional, et elle était à l'époque pleine à craquer pour la prière du vendredi ou pendant le ramadan.
Ses arrangements de briques géométriques et ses faïences turquoises sont particulièrement sophistiquées. La structure de 6.300 mètres carrés avait été conçue de façon à ce que la voix de l'imam puisse atteindre chaque recoin sans difficulté, conduite par des dizaines de dômes courant le long des couloirs entourant la vaste cour intérieure.
Mais avec le déclin de Thatta à partir du XVIIIe siècle, la mosquée a elle aussi périclité.
- Employés négligents -
Des travaux de rénovation menés dans les années 1970 par les autorités fédérales pakistanaises ont fait plus de mal que de bien. Ils ont irrémédiablement endommagé ce qui faisait la beauté du lieu -- notamment son acoustique unique.
"Beaucoup de choses ont été remplacées pendant les travaux et ces remplacements ont détruit le magnifique travail d'origine et désorganisé le système sonore", explique un universitaire local, Mohammad Ali Manji.
"Aucun expert du patrimoine ni archéologue n'a été consulté pour les travaux (de rénovation de l'édifice), et ses caractéristiques originales ont été très abîmées", déplore Qasim Ali Qasim, directeur du département d'archéologie du Sindh.
La façade de la majestueuse arche d'entrée a également été endommagée. Certaines pierres sur lesquelles étaient gravées des versets du Coran ont été transférées vers le musée national de Karachi, puis abandonnées dans un dépotoir par des employés négligents.
Elles n'ont été récupérées que cette année -- mais au lieu de retrouver leur emplacement d'origine, elles ont été installées dans une réplique de l'arche, devant le musée. Une décision qui a déclenché la fureur des dignitaires religieux en charge de la mosquée, qui réclament la restitution des pierres.
Une poignée de fidèles continue de s'y rendre pour prier tandis que les touristes viennent faire des selfies devant les faïences aux motifs géométriques ou floraux, qui se détachent des épais murs de brique rouge sous l'effet de l'humidité.
Selon M. Qasim, des efforts sont en cours pour tenter de drainer l'eau saumâtre des sols environnants qui menace la structure de l'édifice.
Mais, en dépit de son histoire et de ses caractéristiques uniques, il n'y a aucun projet global de rénovation pour cette splendeur vouée à un lent délabrement.
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