"La CGT ne fait pas la loi dans le pays", a lancé à l'Assemblée nationale le Premier ministre Manuel Valls au sujet des blocages organisés par la centrale syndicale pour protester contre le projet de loi Travail, dont il assuré qu'il n'y aura pas de "retrait".
Le chef du gouvernement a aussi écarté une "remise en cause" de l'article 2 du texte sur les accords d'entreprise, un des plus contestés. Le chef de file des députés PS Bruno Le Roux avait semé le trouble en évoquant une possible évolution sur cette question.
De son côté, le président François Hollande a assuré lors du conseil des ministres que "tout serait mis en oeuvre pour assurer l'approvisionnement aux Français et à l'économie", selon des propos rapportés par le porte-parole du gouvernement Stéphane Le Foll.
L'Etat a déjà utilisé trois jours de stocks stratégiques de produits pétroliers sur les 115 disponibles.
Ces ponctions permettent "de répondre plus rapidement aux objectifs de livraison de telle ou telle région parce que ces stocks sont disséminés sur l'ensemble du territoire", a indiqué le secrétaire d'Etat aux Transports, Alain Vidalies, alors que les files d'attente aux stations-services s'étirent et s'étendent dans le pays, notamment en Ile-de-France
"J'ai connu mai 68 et je peux vous dire que ce n'était pas marrant les pénuries donc je prends mes précautions. Le climat actuel m'inquiète, ça na va pas du tout, je crains la révolution", a témoigné à l'AFP Viviane, retraitée de 66 ans dans une station-service de l'Allier.
Le gouvernement a aussi débloqué 11 dépôts pétroliers paralysés par des manifestants, envoyant par exemple à l'aube les forces de l'ordre à Douchy-les-Mines, dans le Nord.
"Les CRS sont allés vite, ils ont utilisé le canon à eau. On sent les forces de l'ordre sur les nerfs", a relevé Willy Dans, porte-parole du syndicat Sud dans le Valenciennois, présent sur place.
Autre mesure rare: les transporteurs d'hydrocarbures ont été autorisés par un arrêté à déroger temporairement aux règles en matière de temps de conduite et de repos.
Selon Pierre Auclair, cofondateur de l'application mobile "Essence comparateur carburant", 4.026 stations sur 11.500 sont "peu ou prou en pénurie de carburant". "C'est très compliqué dans l'ouest, ça se densifie en région parisienne, et toute la vallée du Rhône jusqu'au bassin méditerranéen est touchée."
Total affirme que dans son réseau de 2.200 stations, un peu plus d'un tiers des stations sont en rupture totale ou partielle, même si le secrétariat d'Etat aux Transports assure que la situation s'est améliorée mercredi grâce aux "acheminements massifs" de carburants.
- "Risques d'amplification" -
Opposés à la loi El Khomri, les syndicats, CGT et FO en tête, appellent à une huitième journée de grèves et de manifestations partout en France jeudi pour réclamer le retrait du texte. Mais les protestataires étaient déjà très actifs mercredi.
Le conflit s'est cristallisé autour des sites pétroliers, et six raffineries sur huit au total en France étaient toujours au ralenti ou à l'arrêt.
Et la CGT-Energie tente d'étendre la contestation aux centrales nucléaires, appelant à un mouvement d'action "le plus fort possible" jeudi.
La centrale de Nogent-sur-Seine (Aube), située à une centaine de kilomètres au sud-est de Paris, est déjà touchée. Un des deux réacteurs est à l'arrêt depuis mardi "en raison d'un problème technique" et "on fera en sorte de ne pas le redémarrer", a indiqué Arnaud Pacot, secrétaire général CGT-Energie Aube.
D'autres secteurs économiques sont ciblés, des protestataires tentant de bloquer la plateforme Amazon à Montélimar (Drôme), celle du distributeur Atac à Cournon (Puy-de-Dôme), ou l'accès de la zone industrielle des Marais à Coignières (Yvelines).
Dans le centre de Marseille, des cheminots ainsi que des personnels portuaires en grève se sont affrontés aux policiers, provoquant bousculades et utilisation de spray lacrymogènes.
L'ensemble des organisations patronales a appelé l'Etat à "veiller au respect du droit", le patron du Medef Pierre Gattaz dénonçant même des méthodes des grévistes "irresponsables".
"Sans résolution immédiate de la situation et la fin des blocages, l'arrêt des entreprises de transport routier aboutira à la paralysie de l’économie française", a avancé l'Organisation des transporteurs routiers européens.
Mais le patron de la CGT Philippe Martinez a prévenu qu'il y avait "des risques que la mobilisation s'amplifie", quand celui de FO Jean-Claude Mailly, a assuré "ne pas être dans l'esprit d'arrêter" la mobilisation.
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