Après le Sénat le 10 mai, les députés devraient à leur tour massivement voter la prolongation, pour deux mois, de ce régime d'exception controversé, jusqu'à fin juillet, pour assurer la sécurité de l'Euro-2016 et du Tour de France cycliste.
"La menace terroriste demeure à un niveau élevé et la France représente comme l'UE une cible", a justifié à l'ouverture des débats le ministre de l'Intérieur Bernard Cazeneuve.
En même temps, sur RTL, Manuel Valls a réaffirmé qu'il n'était pas question de "renoncer" à l’organisation de l'Euro et a assuré que "toutes les conditions ont été réunies" pour la sécurité des fan-zones.
L'état d'urgence, instauré par l'exécutif après les attentats du 13 novembre, avait déjà été prorogé de trois mois par le Parlement en novembre, puis encore en février.
Mais même si cette prolongation devrait être largement votée, les deux députés chargés de son contrôle, Jean-Frédéric Poisson (LR) et Dominique Raimbourg (PS) ont mis en doute son intérêt, notant dans leur dernier rapport publié mardi, qu'elle n'était plus motivée que "par le maintien de l'ordre public". Les assignations à résidence et les perquisitions administratives, si "elles ont été très utiles après les attentats", ne sont en effet plus beaucoup utilisées aujourd'hui.
Si ces deux élus saluent la volonté du gouvernement "d'en revenir aux perquisitions judiciaires", ils le mettent en garde contre cette utilisation de l'état d'urgence à des fins d'ordre public car "l'état d'urgence altère sensiblement le régime de la liberté de manifestation".
Il permet en effet aux préfets d'"interdire le séjour dans tout ou partie du département à toute personne cherchant à entraver, de quelque manière que ce soit, l'action des pouvoirs publics".
La préfecture de police de Paris avait ainsi pris de tels arrêtés d'interdiction de manifestation mardi à l'encontre d'une quarantaine de personnes "à l'origine ou associées à des faits de violence" lors de précédents rassemblements contre le projet de loi travail. Mais elle s'était fait désavouer par la justice administrative qui a suspendu neuf des arrêtés émis. Manuel Valls a néanmoins confirmé jeudi que de nouvelles listes de personnes interdites de se rendre à des manifestations seraient déposées par les autorités.
Si elle approuve la prolongation de l'état d'urgence, la droite continue cependant de reprocher au gouvernement de laisser "la chienlit s'installer", avec notamment en ligne de mire les rassemblements Nuit debout.
- Perpétuité 'incompressible' -
Cette fois-ci, l'état d'urgence sera prolongé de deux mois, pas de trois, parce que sera promulgué dans l'intervalle le projet de loi dit de réforme pénale, dont certaines mesures s'inspirent de l'état d'urgence.
Les députés vont en effet approuver définitivement jeudi le compromis trouvé avec les sénateurs sur ce texte, avant un ultime vote du Sénat le 25 mai.
"Ce n'est pas une transposition de l'état d'urgence, mais c'est un outil qui permet de se passer de l'état d'urgence", plaide le rapporteur PS à l'Assemblée Pascal Popelin, sur ce vaste projet de "lutte contre le crime organisé, le terrorisme et leur financement".
Parmi les dispositions majeures et controversées du projet de loi, la possibilité, lors d'un contrôle d'identité, de retenir en cas de soupçons terroristes une personne pendant quatre heures pour vérifier sa situation. Ou encore la possibilité d'assigner à résidence pendant un mois des individus de retour de "théâtre d'opérations de groupements terroristes", comme la Syrie, mais contre lesquels il n'y a pas d'éléments suffisants pour justifier une mise en examen.
Dans la discussion parlementaire ont été ajoutées plusieurs mesures. Outre la création d'une perpétuité "incompressible" pour les crimes terroristes (avec période de sûreté maximale relevée de 22 à 30 ans et des conditions d'aménagements de peine au-delà durcies), y figure l’élargissement des possibilités de fouilles intégrales des détenus en cas de soupçons d'intrusion d'objets illégaux comme des téléphones, ce qu'a dénoncé la contrôleure générale des prisons, Adeline Hazan.
Mais la majorité de gauche de l'Assemblée n'a pas suivi celle de droite du Sénat qui voulait supprimer la contrainte pénale, sanction alternative à la prison créée par la loi Taubira, ou instaurer une rétention de sûreté permettant de maintenir une personne enfermée même une fois la peine purgée.
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